APPLICATION DES GRENATS A LA GEOTHERMOBAROMETRIE

 

 

 

 

 

Dr. Alain ABREAL

 

 

 

 

 

 

 

La géothermobarométrie est une nouvelle science qui, comme le nom l’indique permet à partir d’équilibres entre minéraux de définir les domaines de température et de pression sous lesquelles une roche s’est formée.

 

Cette science s’est particulièrement développée depuis le milieu des années 80 sous l’influence des pétrologistes et des chercheurs de diamants. En effet, l’analyse géothermobarométrique des roches échantillonnées sur site, permet de mieux définir les pressions de formation de la roche et ainsi de définir la probabilité qu’occure celle-ci de renfermer des diamants.

 

 

1.        LES GRILLES PETROGENETIQUES

1.1      Définitions

Une grille pétrogénétique est un diagramme Pression-Température sur lequel sont répertoriés des segments d’équilibres chimiques entre associations de minéraux. Ces segments délimitent ainsi les domaines d’existence de ces associations.

 

NOTA

Par association, on entend associations d’un ou plusieurs minéraux. On parle également d’assemblage.

 

 


 

1.2      Exemple (Fig. 1)

Prenons par exemple trois minéraux distincts A,B et C mais de sorte que A et B peuvent coexister à basse température et que C soit une recombinaison de A et B à haute température.

Nous pouvons décrire l’équilibre chimique entre ces trois minéraux par la relation :

 

m A + n B = o C                       réaction (1)

 

où m,n, et o sont les coefficients stoechiométriques de la réaction.

 

Aux basses températures, il y a coexistence entre les phases minéralogiques A et B. Lorsque la température augmente et franchit le segment A+B/C, qui traduit l’équilibre thermodynamique entre ces associations, la réaction (1) se produit avec formation de la phase C.

 

Le segment A+B/C sur la grille pétrogénétique définit les couples PT (pression-température) pour lesquels il y a coexistence entre les produits de la réaction (C) et ses réactants (A et B) et délimitent les domaines d’existence de A+B et C.

 

Remarque

Dans notre exemple, le minéral A est encore présent après réaction avec B, car le minéral A est en excès. Lorsque toute la quantité disponible du minéral B a réagi avec le minéral A, la réaction (1) ne peut plus se poursuivre. La part du minéral A qui n’a pas réagi auparavant,  ne peut alors plus être consommé et subsiste avec C, malgré le fait que l’on ne soit plus dans le domaine de stabilité de l’association A+B.

 

1.3      Paragenèse

La paragenèse, c’est l’assemblage ou association de minéraux. Elle dépend principalement de la composition chimique du milieu, mais également des conditions PT, qui délimitent les domaines d’existence des minéraux.

 

 

1.4      De l'observation de terrain au diagramme PT

En général, le pétrologiste récolte des échantillons sur le terrain et cherchent à définir les conditions de pression et de température de formation de la roche.

Pour cela, il échantillonne la roche sous la forme de lames minces qu’il observe au microscope polarisant. Son œil exercé lui permet généralement d’identifier la nature des minéraux présents ; en cas de litige, il peut avoir recours à d’autres systèmes d’analyses comme la microsonde électronique.

Comme la structure des minéraux est directement corrélée au degré de déformation subi par la roche mère (Figure 2), le géologue peut ainsi, à partir de ses observations, définir l’état d’avancement de déformation de la roche.

Lorsqu’une roche subit des contraintes de pression, il y a déformation progressive des minéraux présents avec formation de nouvelles structures en lieu et place des structures originelles, on parle d’évolution prograde.

Plus tard, sous l’effet du relâchement de ces contraintes la pression décroît (on parle alors d’évolution rétrograde), et des volumes exempts de matière apparaissent, dans lesquels de nouveaux minéraux peuvent cristalliser. Ces nouveaux minéraux se reconnaissent aisément. Puisqu’ils sont généralement issus de réaction entre minéraux contigûs à ces espaces libérés, et donc postérieurs à l’accroissement des contraintes, ils ne présentent  aucune déformation due au métamorphisme et sont généralement bien formés.

 

NOTA

Il est toutefois important de noter que ces « espaces » ne sont pas des géodes, mais plutôt des volumes micrométriques.

 

Le géologue peut ainsi définir pour un site donné, la nature des minéraux présents et le degré de métamorphisme subi par la roche. En procédant ainsi de proche en proche, à partir d’échantillons récoltés régulièrement sur le terrain, il peut déterminer la courbe d’évolution de la région.

Après avoir déterminé pour un échantillon de roche donné, la nature des minéraux constituants (grille pétrogénétique) et la structure de ses minéraux (courbe d’évolution), le géologue n’a plus qu’à superposer les différentes grilles pétrogénétiques correspondantes aux minéraux obervés et la courbe d’évolution obtenue pour lire le domaine de pression et de température subies par la roche mère.

Dans l’exemple de la Figure 3 d’une roche schisteuse, principalement constituée de Al2O3-SiO2-CaO-MgO-K2O, sous différentes formes, la superposition des grilles pétrogénétiques des domaine d’existence du grenat, de la chlorite, de la staurotide et de la biotite avec la courbe d’évolution de la roche en fonction du degré de métamorphisme permet de déterminer les conditions PT subies par la roche.

Prenons un échantillon qui possèderait une structure très orientée et renfermerait des staurotides, des chlorites et des biotites, le positionnement d’un tel échantillon serait localisé à l’emplacement de la grande croix verte dans le diagramme PT. De proche en proche, le géologue positionne ainsi tous ces échantillons en fonction des minéraux présents et de leur structure

 

1.5      Isogrades

            Il est d’usage de reporter sur les cartes topographiques les limites des régions géographiques dans lesquelles un minéral donné est présent. Ces limites sont appelées isogrades, isogrades positives (notées + ) lorsqu’il s’agit de la limite d’apparition de ce minéral, et isogrades négatives (notées -) dans le cas de sa disparition.

 

 

 

 

Figure 1 : Grille pétrogénétique et présentation des domaines d’existence de l’association de minéraux Aet B, et C

 

 

 

Figure 2 : Courbe d’évolution d’une roche lors d’un processus métamorphique

Déformation des minéraux en fonction du degré de métamoprhisme lors du parcours prograde

Formation et cristallisation de nouveaux minéraux lors du parcours rétrograde

 

Figure 3 : Superposition de grilles pétrogénétiques et de la courbe d’évolution d’une roche

Exemple d’une roche schisteuse dans le faciès des amphiboles.

En fonction des compositions des minéraux et des déformations qu’ils ont subies au cours du métamorphism, il est possible de positionner un échantillon sur ce diagramme et de là de lire les pressions et température de sa formation. Ainsi, pour une association cyanite + biotite, on obtient des températures entre 585 et 670°C, pour des pressions comprises supérieures à 5 kbars. L’analyse structurale de proche en proche de plusieurs échantillons permettra d’affiner ces valeurs.

2.        THERMODYNAMIQUE DE REACTION

2.1      Généralités

2.1.1. Définition

Pour simplifier, l’enthalpie libre ou Energie de Gibbs G, est le potentiel thermodynamique qui nous permet de savoir si une réaction peut intervenir naturellement, sans interventions extérieures et sous quelles conditions physiques.

On exprime G par l’expression :

 

                                                                        G = U + PV - TS                                (Equation 1)

                                                                =      H      - TS

 

     

U  est l’énergie interne du minéral (chaleur, énergie de surface, énergie des dislocations, énergie de liaisons, etc…)

H  est l’enthalpie du minéral (l’entalpie de formation d’un composé a une valeur généralement bien connue), il s’agit d’une valeur d’état plus complète que l’énergie interne U, car l’enthalpie rend compte également des variations de volume du minéral soumis à une pression.

  est l’entropie (elle définit le caractère ordonné ou désordonné du minéral), elle est directement corrélée à l’apport de chaleur reçue dQ par le minéral : pour une variation élémentaire dS = dQ /T

P : Pression       V : Volume                 T : Température

 

 

Figure 4 : Courbe de l’enthalpie libre déterminée comme étant la différence G = H-TS, pour un minéral donné

 

 

2.2      Relations entre G, S et V

            Si l’on différencie l’expression eq.1, nous obtenons

           

            dG = dU + PdV + VdP – SdT – T dS

 

Or        TdS = dU + PdV

 

D’où                                                                dG = VdP – S dT                                (Equation 2)

 

L’expression 2 fait ressortir les influences de la pression et de la température sur l’enthalpie libre.

 

Or dG =  æ G ö  dT +    æ G ö    dP                           

               è  P øT             è ¶ T øP        

 

d’où                             æ G ö   =  V                         et         æ G ö    =  - S                       (Equation 3 a) et b))

                               è  P øT                                                      è ¶ T øP

 

 

2.3      Enthalpie libre de formation

De même qu’il existe des enthalpies de formation, il existe des enthalpies libres de formation :

 

            G = H - TS

 

D’où                                                           DfGo  = DfHo – T DfSo                                                    (Equation 4)

 

 

 

Figure 5: Diagramme P-T-G montrant les surfaces d’énergie libre à partir de ces deux dérivées partielles

                respectivement par rapport à T, à P constante : –S,          et par rapport à P, à T constante : V

 

 

2.4      Enthalpie libre de réaction

            Il s’agit là de l’intérêt premier de l’enthalpie libre, car elle permet de dire si une réaction va avoir lieu ou pas, et permet de décrire les états d’équilibre thermodynamiques et chimiques.

 

 

Soit une réaction r : m A + n B = o C + p D , l’enthalpie libre de la réaction vaut :

 

DrG    = DrH – T DrS                                                                                        (Equation 5 a))

                      = DGfo produits - DGforéactifs    

                                  = o DGfoC + p DGfoD – m DGfoA – n DGfoB                                                          (Equation 5 b))

 

 

Si DrG  = 0, il n’y a pas réaction : les produits et réactifs sont en équilibre thermodynamique.

 

Si DrG  <0, l’enthalpie libre des produits est inférieure à celle des réactifs, il y a réaction dans le sens de formation des produits (de gauche à droite)

 

Si DrG  >0, l’enthalpie libre des produits est supérieure à celle des réactifs, la réaction se produit dans le sens contraire de celui écrit, les produits réagissent pour donner des réactifs (réaction de droite à gauche).

 

Une réaction aura toujours lieu thermodynamiquement dès que DrG ¹ 0, de manière à diminuer l’enthalpie libre en valeur absolue jusqu’à zéro, et atteindre ainsi l’équilibre.

 

 

Figure 6 : Courbes des enthalpies libres pour deux phases distinctes

(Phase ou minéral A représenté par le trait plein et Phase ou minéral B représenté par le trait pointillé) , déterminées comme étant la différence G = H-TS

Il y a équilibre thermodynamique entre ces deux phases si l’enthalpie libre de la réaction DGr = DGA - DGB = 0

 

 

2.5      Relation de Clapeyron – Diagramme de phase

La relation de Clapeyron est un outil très intéressant qui relie l’enthalpie libre d’une réaction aux paramètres de conditions de formation d’une roche P et T. En effet :

 

DrG  = DrH – T DrS

 

Or, en remplaçant  DrH, on obtient :

 

DrG  = DVr dP    DrS dT                                (Equation 6)

 

A  l’équilibre DrG  = 0,  et donc  DVr dP  =  DrS dT

Soit

 

 

 

              dP = DrS             Relation de Clapeyron

          dT    DVr             à l’équilibre

                                                        (Equation 7)

 

 

 

Ainsi, il est possible de tracer dans le diagramme PT, la courbe d’équilibre entre deux phases (ou minéraux).

Un diagramme de phase n’est autre qu’un diagramme d’enthalpie libre où les courbes sont définies par Ga = Gb, et délimitent les domaines où Ga < Gb (ie le domaine d’existence de la phase a) et où Ga > Gb (ie le domaine d’existence de la phase  b).

 

 

Figure 7 :: Courbe d’équilibre entre deux phases

 L’équation de Clapeyron décrit cet équilibre et permet de définir dans l’espace PT les domaines d’existence des deux phases en présence. C’est la définition d’un diagramme de phase

 

 

2.6      Constante d’équilibre

            La constante d’équilibre est directement corrélée à l’enthalpie libre de la réaction par la relation :

 

      0 = DrGo + RT Ln  K                          (Equation 7)

 

 

A l’équilibre                                                  DrGo =0, ie K=1.

 

Les géologues et les pétrologistes ont souvent l’habitude de tracer les droites lnK = …,-3, -2, -1, 0, 1, 2, 3,… dans les diagrammes PT, pour définir les couples PT de formation d’une roche.

 

 

Figure 8 : Diagramme DrGo fonction de P,T et ln K

Les géologues ont l’habitude de tracer les droites à ln K constant. Pour des solutions idéales, pour lesquelles ai = xi, K représente la rapport des concentrations des produits sur celles des réactifs de la réaction en équilibre pondérés par leur coefficient stoechiométrique. A K donné, les compositions des minéraux sont fixes. Ces droites sont appelées isoplèthes.

NOTA

Ne s’agissant ici qu’une introduction à la thermodynamique, nous ne nous attarderons pas sur les termes de cette relation. Toutefois, il convient d’avoir à l’esprit que les constantes thermodynamiques sont généralement bien connues, ainsi l’erreur sur le valeur de DrGo  peut parfaitement être négligée face à l’erreur sur lnK qui, elle, comme nous le verrons, atteint parfois des valeurs importantes.

 

 

2.7      Activité

Pour une réaction du type m A + n B = o C + p D, la constante d’équilibre vaut

                 

                                                                        K = aCo . aDp                                                     ( Equation 8 )

                                                                         aAm . aBn

 

où ai représente l’activité du composé i.

 

Or, ce que l’on connaît lors de l’étude d’une roche, ce ne sont pas les activités ai mais les concentrations Xi des différents composés i. Il est donc indispensable d’avoir une relation entre activité et composition.

 

Pour cette raison, l’activité ai  a été décomposé en deux termes sous la forme

 

 

 

ai  = xi.i              appelée relation a-x     

   (Equation 9)

                                                                                                                                                               

       xi est l’activité du composé i dans un mélange idéal

i est le coefficient d’activité du composé i dans le mélange réel

 

Les minéraux naturels ne sont généralement pas purs et se présentent le plus souvent sous la forme de solutions solides complexes (un grenat n’est jamais pur et peut être par exemple composé d’un mélange de grossulaire et de spessartine, autre exemple les Tschermakite dans les clinopyroxènes, etc…). Le coefficient d’activité i est donc présent dans l’expression eq.10 pour prendre en compte la différence entre un état parfait de la matière, représenté par des minéraux purs, pour lesquel ai = xi (i =1), et la réalité.

 

Malheureusement, les solutions solides peuvent être très compliquées. De ce fait, les relations a-x ne sont que très rarement linéaires et nécessitent d’être modélisées pour fournir une estimation exploitable.

 

Prenons par exemple deux grenats almandin Fe3Al2Si3O12 et pyrope Mg3Al2Si3O12. Compte tenu que les dimensions des cations Fe2+ et Mg2+ sont très voisines et que leurs charges sont égales, il peut y avoir substitution d’un cation par l’autre. Ce qui crée de fait, un mélange au sein du grenat entre almandin et pyrope. L’activité aGrenat d’un grenat réel, intermédiaire entre ces deux minéraux limites, sera définie à partir des concentrations en Fe2+ (ou Mg2+ puisque XFe2+ + XMg2+ = 1), et du terme correctif qui sera défini par la modélisation choisie.

 

 

3.        ENTROPIE DE MELANGE – RELATION ACTIVITE-COMPOSITION a-x

 

Le dessein de cet exposé n’est pas de vous montrer les calculs nécessaires à la détermination d’un modèle suffisamment fiable pour définir la relation activité-composition mais de vous montrer la complexité de ce travail.

 

 

3.1      Solutions solides minérales

Les minéraux sont des substances chimiques complexes qui se présentent sous différentes structures cristallines et qui occupent une énorme gamme de composition chimique. Cette grande variabilité dans la composition  est le résultat  de substitutions  d'éléments  dans la maille du cristal.  En raison de ces variations de

Figure9 : Diagrammes de distribution d'éléments pour illustrer la division des éléments entre deux minéraux.

NOTA :

KD est définie par l’équation 8. Il s’agit de la constante d’équilibre associée aux minéraux purs : K = KD lorsque i =1.

a) XMg dans les grenats fonction de XMg dans le clinopyroxène. Ce type de diagramme est appelé "diagramme de Roozeboom" et est probablement le diagramme le plus fréquemment utilisé pour documenter la distribution d'élément entre deux phases,

b)  logarithmes des rapports de Mg/Fe. Les valeurs du lnK D sont indiquées par l'interception de l'axe des ordonnées à x = 0 (ligne verticale pointillée ). Les lignes isoplèthes ont une pente constante de 45° si les deux minéraux se mélangent idéalement. Si l’un ou les deux minéraux ne se mélangent pas idéalement,  si les cations de Fe et de Mg sont préférentiellement localisés dans un site particulier de la structure minérale, les pentes des lignes isoplèthes dévient alors de cette pente de 45°.

c) Il s’agit du "diagramme de Nernst", dans lequel les rapports de Mg/Fe des minéraux sont tracés l'un en fonction de l'autre. La pente des lignes isoplèthes correspond à la valeur de KD,

 

 

 

Figure10 : Lignes isoplèthes pour les géomètres grenats-biotites

composition, les  minéraux sont souvent désignés, lorsque cela s’avère possible,  sous le nom des solutions solides cristallines entre leurs minéraux limites respectifs.

 

Définition

Dans tout cet exposé, nous entendrons par minéral limite, ou pôle minéral, un minéral pur qui représente un pôle du diagramme binaire, ternaire, ou quaternaire, d’une famille de composés. Ainsi les pyrope, almandin et spéssartine sont les pôles ou minéraux limites des grenats Pyralspites ; hédenbergite et diopside sont les minéraux limites où pôles des pyroxènes de compositions (Fe,Mg) SiO3, etc.

L'ampleur avec laquelle la substitution peut se produire est essentiellement fonction de la température et à un degré moindre de la pression. Elle dépend également de la taille et de la charge des cations impliqués.

Par exemple, pour les alliages métalliques, les substitutions "faciles" sont possibles si les différences en diamètres des cations de substitution sont inférieurs d’environ 14 à 15 % (Hume-Rothery 1939). En géologie, dans les structures des oxydes et des silicates, les substitutions sont aisées, au moins à température élevée, dès que la différence en volume molaire des minéraux limites n'excède pas 5 à 6 % (Kerrick 1975).

 

La composition de l'olivine peut être représentée par la formule structurale générale X2SiO4, avec X représentant les cations bivalents de coordinence 8, comme Fe2+, Mg2+, Ca2+ ou Mn2+. Dans le système chimique FeO-MgO-MnO-SiO2 (FMMnS), il y a trois minéraux limites qui définissent l'espace compositionnel d'une solution solide d'olivine :

 

Minéral limite

site octaèdrique

M

site tétraèdrique

T

 

Rayon des cations

(d’après Whittaker et Muntus 1970)

 

Fayalite

 

Forstérite

 

Tephroite

 

 

Fe2

 

Mg2

 

Mn2

 

Si

 

Si

 

Si

 

O4

 

O4

 

O4

 

Fe2+   =  0,86 Å

 

Mg2+   =  0,80 Å

 

Mn2+   =  0,75 Å

 

Compte tenu que les rayons des cations bivalents sont voisins, un échange entre le Mg2+ et Fe2+, décrit comme vecteur d’échange FeMg –1  ( cf Thompson 1983), peut avoir lieu facilement dans l'olivine. Ce qui est conforme à l'observation de l'olivine réelle sous-solidus, qui peut avoir n'importe quelle composition entre les minéraux limites forstérite et  fayalite. Une solution solide comme l'olivine, où une substitution est limitée aux mêmes sites dans la maille (ie sous-maille), s'appelle une solution solide simple. Une telle solution a le même nombre de phases chimiquement indépendantes (par exemple Fe2SiO4, Mg2SiO4, Mn2SiO4), qu’il y a de minéraux limites  (dans ce cas, fayalite, forstérite et tephroite).

 

Cependant, ce n'est généralement pas vrai : comme par exemple dans le cas des grenats, dans le système CaO-FeO-Al2O3-SiO2-Fe2O3  (CFASO). La formule des grenats peut être écrite sous la forme X3A Y2M Z3T  O12  avec X = (Ca, Fe2+), Y =(Al, Fe3+) et Z = Si ; les exposants décrivant les sites dans la maille, les indices indiquant le nombre d'atomes sur les emplacements respectifs. Dans ce système, il y a quatre pôles ou minéraux limites :

 

Minéral limite

site pseudo-cubique

A

site octaèdrique

M

site tétraèdrique

T

 

 

almandin

 

grossulaire

 

skiagite

 

andradite

 

Fe32+

 

Ca3

 

Fe32+

 

Ca3

 

Al2

 

Al2

 

Fe23+

 

Fe23+

 

Si3

 

Si3

 

Si3

 

Si3

 

 

O12

 

O12

 

O12

 

O12

Seulement trois des quatre phases limites sont linéairement indépendantes, la quatrième phase peut toujours être définie par la  combinaison linéaire des trois autres. Par exemple,

 

    Fe32+ Fe23+ Si3O12     =     Ca3Fe23+Si3O12   + Fe32+Al2Si3O12 -  Ca3 Al2Si3O12

            Skiagite            =          andradite       +    almandin      -     grossulaire

 

Dans ce cas-ci, il y a davantage de minéraux limites existant que de phases indépendantes.

 

De plus, les solutions solides pour lesquelles les substitutions interviennent sur plus d'un site atomique sont appelées solutions solides complexes. Dans les grenats, la substitution CaFe2+-1  se produit sur les sites hexaédriques A, tandis que la substitution AlFe3+-1   ne se produit que sur les sites octaédriques M. Ces deux substitutions sont indépendantes l’une de l’autre.

De telles solutions solides complexes sont désignées sous le nom de solution solide réciproque ou  multi-sites.

 

 

3.2      Substitutions : Quelques Remarques Générales (cf § 4.2.2)

 

 

3.3      Thermodynamique  des solutions solides

La manière dont un mélange a lieu dans un minéral est considérablement influencée par la taille et la charge des atomes mis en cause sur un emplacement spécifique, mais aussi par la géométrie de cet emplacement. La distribution des atomes dans le réseau cristallin affecte l’enthalpie libre molaire d’une solution totale et donc, les activités des minéraux limites purs i de cette solution. Les activités ai sont primordiales pour tout calcul d'équilibre de phases puisqu'elles sont par la constante d'équilibre K, directement liées à l'équation thermodynamique fondamentale  0 = DrGo + RT Ln  K.

           

Ainsi, les activités des phases dans un minéral, par exemple ceux des minéraux limites grossulaire ou almandin dans une solution solide de grenats, dépendent de l’arrangement ou de la configuration des atomes et de leurs interactions énergétiques à l’intérieur même de la structure cristalline.

 

Il y a deux cas de limitation qui décrivent l'arrangement des atomes : premièrement, une distribution parfaitement ordonnée des atomes sur les sites dans la maille et, deuxièmement, une configuration complètement désordonnée ou aléatoire des atomes.

La plupart des minéraux naturels ont des états d’ordre intermédiaires. La distribution des atomes dans la structure cristalline a une influence sur  l'entropie du mélange, Smélréel ou  sur l’enthalpie de configuration du minéral, Sconfig. A toute température donnée, les solutions solides totalement désordonnée (fig. a) ont une entropie configurationnelle maximale. Réciproquement, les solutions totales dont la distribution est parfaitement ordonnée (fig. b) ont une entropie configurationnelle nulle. Et les arrangements partiellement ordonnés ou désordonnés ont des valeurs d’entropie intermédiaires.

 

Une augmentation du désordre aura toujours comme conséquence une augmentation d'entropie de la solution. Si l'entropie du mélange d'une solution est connue en fonction de la pression P , de la température T , et de composition du minéral Xi , les activités des phases dans ce minéral peuvent être déterminées explicitement et par conséquent, la constante d'équilibre K peut être établie de manière non équivoque. Ce qui cependant, exige la connaissance de la distribution des atomes dans le réseau cristallin en fonction de ces variables.

 

Or, dans chaque mole d'une substance il y a 6,02. 1023 atomes (nombre d'Avogadro), et chaque configuration différente de ces atomes donne une entropie de mélange distincte et donc, à différentes activités des minéraux limites dans cette solution. Par conséquent, la formulation de l’entropie Smélréel pour un minéral réel en fonction de P,T et Xi est, même pour des phases proche d’un mélange idéal, tout à fait approximative (Guggenheim 1966; Powell 1983) et  impossible à déterminer pour un degré supérieur de non-idéalité. D'un point de vue microscopique c'est parce que Smélréel est la conséquence directe du nombre de possibilités selon lesquelles les atomes peuvent être organisés dans un réseau. Comptabilisant le nombre faramineux de ces possibilités, il est impossible pour un minéral réel de déterminer Smélréel si ce n’est par des hypothèses très restrictives (Powell et Holland 1993), parce ce qu’en fait l'organisation des atomes dans une structure est fortement influencée par la présence des effets locaux à courte distance et à grande distance. Les effets d’un ordre à grande distance agisse translationnellement à travers tout le cristal et c’est la dispersion des atomes sur les sites ou les sous-réseaux cristallographiques distincts, ie que l’ordre à grande distance peut être exprimé simplement par la fraction molaire de l’élément i sur le site S, noté XiS.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Figure 11 : Distribution d’un nombre égal d’atomes de A et de B dans un réseau cubique.

a) Distribution désordonnée : l'échange des deux atomes 1 et 2 de A ne change pas l'énergie du cristal, tandis que la substitution de l’atome 1 de A par l'atome 3 de B mènera à un nouvel état d'énergie.

b) Distribution totalement ordonnée des atomes de A et de B sur deux sous réseaux : chaque sous réseau est entièrement occupé avec des atomes de A ou de B, respectivement.

 

 

Ce type d’ordre est communément désigné comme étant un mélange indépendant ou aléatoire de 2 éléments sur un même site, comme par exemple le mélange Ca-Mg sur le site A du grenat, qui est totalement indépendant du mélange sur un site différent, comme le mélange Fe3+-Al sur les sites octaédriques M de ces grenats.

 

Les mélanges aléatoires produisent des cristaux complètement désordonnés dont l’entropie configurationnelle correspond à l’entropie configurationnelle idéale du mélange Sidmel.

 

L’ordre à courte distance a un rôle important dans les substitutions couplées à charge équilibrée, et est responsable de la différence observée par rapport à un mélange aléatoire, et par conséquent, par rapport à l’idéalité.

Le comportement d’un mélange non idéal d’un minéral peut ainsi être attribué aux processus d’ordonnancement local dans le cristal, pour lesquels, malheureusement, il est aujourd’hui impossible de prévoir la configuration des atomes dans la structure d’une manière satisfaisante. L’ordre à courte distance cause une préférence pour certains atomes autour de certains autres atomes particuliers. Ainsi, en faisant varier les conditions PT, l’ordre à courte distance est responsable de la variation d’état d’ordonnancement d’un cristal et de sa divergence par rapport à un mélange idéal. Par exemple, dans un système binaire, il y a une préférence pour un ordre A-A ou B-B plutôt qu’une répartition aléatoire de A et de B au sein du cristal. L’ordre à courte distance peut être observé s’il y a une différence importante de taille entre les cations et/ou s’il y a mélange de charge dans un sous-réseau. En outre, des substitutions couplées comme celle des plagioclases (CaAlNa-1Si-1) ou celle de Tschermak ((Fe,Mg)SiAlVI-1AlIV -1) sont fortement influencées par l’ordre à courte distance, puisque ces substitutions sont associées avec la préférence pour le plus proche voisin dans le cristal.

 

Puisque les effets de l’ordre à grande distance peuvent être exprimées par Sidmel, les phénomènes d’ordre posent des problèmes considérables parce qu'ils sont non seulement difficiles à mesurer mais, aussi, il n’existe aucune manière standard d'exprimer l'entropie de mélange d'un minéral naturel en présence des effets d’ordre à courte distance. Ceci car le nombre de possibilités qu’a un atome d’être localisé dans la structure ne peut pas être prédit, justement à cause de cette préférence pour le plus proche voisin. Sans avoir un modèle physique réaliste pour décrire les effets de l’ordre à courte distance, il est impossible d’écrire une expression analytique pour Sréelmel , et par conséquent pour l’activité ai.

 

Pour résoudre ce dilemme, l’activité ai est habituellement décomposée en deux facteurs

-       une activité de mélange idéal, xi (Guggenheim 1966)

-       un coefficient gi, qui rend compte du mélange aléatoire, et ainsi de la non-idéalité d’un minéral

 

L’activité de mélange idéal, appelée également fraction molaire thermodynamique (Powell 1978), fraction molaire équivalente (Ganguly et Sazena 1987) ou activité configurationnelle (Ghiorso 1984, Price 1985), est due à l’ordre à longue distance, et le coefficient d’activité est la conséquence des effets à courte distance.

La décomposition de l’activité en ces deux facteurs est totalement arbitraire et n’est qu’un outil mathématique utilisé car il est difficile voire impossible de déterminer explicitement l’entropie de mélange d’une solution solide.

 

Voici donc l’origine de l’expression               ai  = xi gi.

 

 

Par conséquent, formuler l’activité d’un composant i dans un minéral nécessite les expressions de l’activité d’un mélange idéal et du coefficient d’activité gi. La première peut être par obtenu par Sidmel, et la seconde peut être écrite séparément.

 

 

3.4      Concept de solution solide idéale – non idéale

Une solution idéale est une solution dans laquelle il n’y a aucune interaction entre les deux types de cations et le mélange de minéraux limites qui constituent le minéral réel est aléatoirement réparti dans le cristal.

 

Cette non inter-dépendance conduit à ce que le coefficient d’activité soit égal à 1,  ainsi, ai = xi.

Dans la réalité, il y a interaction entre les différents cations, ne serait-ce que par la différence de taille entre les deux cations. La substitution d’un cation d’une certaine dimension par un cation de taille supérieure va nécessairement modifier l’environnement de son site à l’intérieur du cristal et ainsi interférer sur les cations environnants (effet à courte distance).

Ainsi, dans une solution non-idéale, les coefficients d’activité ont des valeurs différentes de 1 (supérieures ou inférieures), et surtout ils sont dépendants des concentrations des différents composés, de la température, voire de d’autres paramètres.

 

L’influence de la température peut être montrée, par exemple en observant certains mélanges de minéraux dont les différences dans les dimensions des ions substitués sont assez conséquentes (>15%). Ces mélanges qui peuvent donner des solutions solides à haute température ne forment alors qu’un seul minéral (mélange des deux pôles), mais qui voient leur miscibilité chuter lorsque la température décroît et forment alors une association des deux minéraux limites aux basses températures.

 

 

3.5      Activités de Mélange Idéal

Clairement, la configuration des atomes dans la structure cristalline affecte les activités réelles et idéales des phases qui composent la solution solide. Dans ce paragraphe, nous allons nous limiter à l’étude des mélanges idéaux et discuter certains des modèles utilisés pour décrire le comportement de mélange idéal des minéraux.

 

 

3.6      Concepts Généraux

Un mélange entre deux pôles minéraux peut avoir lieu de plusieurs manières :

 

(1)      le mélange intervient entre deux cations différents sur seulement un emplacement, par exemple, l'échange cationique  FeMg-1 entre les pôles almandin et pyrope dans les grenats. Dans cet exemple,  le mélange est limité aux sites A.

(2)      plus de deux cations se mélangent sur un même site, comme, par exemple, entre les grenats almandin, pyrope et grossulaire tous trois pôles dans le système CaO-FeO-Al2O3-SiO2-Fe2O3 (CFASO). Ici encore, le mélange se produit seulement sur les sites A.

(3)      le mélange se produit indépendamment sur plusieurs emplacements. Ceci, par exemple, s'applique aux solutions solides dans les grenats de composition  (Ca,Fe)3A (Al,Fe3+)2 M  Si3O12 dans le système CaO-FeO-Al2O3-SiO2-Fe2O3 (CFASO), dont les quatre pôles sont grossulaire, almandin, andradite et skiagite. Dans cette solution, Ca2+ et Fe2+ se substituent sur les trois sites hexaédriques A, indépendamment de Al3+ et Fe3+ qui se substituent sur les deux sites octaédriques M. De telles solutions sont généralement désignées sous le nom des solutions réciproques ou multi-sites.

 

Tous ces concepts décrivent un mélange d’atomes indépendant sur des sites distincts de la structure cristalline et sont appelées modèles MOS (« mixing on sites » ou mélange sur sites). Chacun de ces trois modèles de mélange impliquent l’absence de tout effet d’ordre à courte distance et décrivent ainsi, des solutions solides totalement désordonnées.

 

 

Maintenant, si l’on considère la solution solide des plagioclases entre les pôles albite NaAlSi3O8 et anorthite CaAl2Si2O8.

 

(4)    Dans la structure des plagioclase  Na+ et Ca2+ sont localisés sur de larges interstices (sites A) de coordinence 8 et Al3+ et  Si4+ sur quatre sites tétraédriques T. La substitution d'un cation Ca2+ par un cation Na+ sur le site A cause un déséquilibre de charge électrique. Pour satisfaire à la neutralité électrique de la matière, cela entraîne la substitution cocourante d’un Si4+ par un Al3+ sur les sites T (charge de Na+-Si4+ = charge de Ca2+-Al3+  = 5) : il s’agit donc d’une substitution par équilibrage de charge et elle est désignée par le nom de substitution couplée, car la substitution de Ca par Na exige strictement au sens numéraire une substitution simultanée de Si par Al.

Par conséquent, il est concevable que les atomes de Ca et d'Al aussi bien que ceux de Na et Si soient liés ensemble dans la structure des plagioclases et se comportent comme complexes ioniques tels que (CaAl)5+ et (NaSi)5+. On parle alors de principe de préférence pour le plus proche voisin, phénomène attribué à l’existence d’effets à courte distance.

Dans ce cas, il n’est pas possible d’exprimer l’entropie du mélange réel Sréelmel et donc l’activité ai, pour le système binaire des plagioclases étudié.

Pour les substitutions couplées, le problème s’aggrave encore car il n’est que rarement possible d’exprimer explicitement l’entropie idéale de mélange Sidmel, la fraction molaire Xi et finalement l’activité de mélange idéal xi. D’un point de vue thermodynamique statistique, il n’y a aucun a priori ou même une meilleure solution à ce problème, mais il y a plusieurs possibilités pour approximer ou modéliser le comportement de mélanges idéaux de solutions solides (Kerrick and Darken 1975). De tels modèles sont basés sur des mélanges moléculaires, des mélanges aléatoires sur chaque site ou des mélanges aléatoires sur certains types de sites.

 

 

3.7      Modèles thermodynamiques pour les activités de mélange idéal

Les modèles thermodynamiques ont pour but de définir une relation exploitable entre les activités de mélange idéal du composé i xi et sa concentration dans le mélange Xi.

 

Le modèle de mélange moléculaire est le modèle d'activité le plus simple. Il est basé sur le fait que le mélange a lieu entre la totalité des composants de phase, par exemple entre albite NaAlSi3O8 et anorthite CaAl2Si2O8, et implique l'ordre à courte distance.

Pour ce modèle de mélange moléculaire, les relations x-X sont simplifiés au maximum puisque xi = Xi.

Un autre avantage de ce modèle est qu’il permet toujours de déterminer l’entropie configurationnelle d’une solution solide.

 

En revanche, la substitution des ions sur des sous-réseaux discrets dans la structure du cristal est décrite par le modèle de mélange aléatoire, qui est désigné généralement sous le nom de modèle de mélange "ionique". Dans le contexte de ce modèle il y a absence totale des effets de l’ordre à courte distance et par conséquent, les solutions solides décrites par le modèle de mélange aléatoire ont une entropie configurationnelle maximale.

Pour ce modèle, il est nécessaire de faire intervenir dans la relation xi-Xi, tous les cations du composé i de la manière suivante xi = Xcation 1sur site 1  .  Xcation 2sur site 2

 

 

Applications :

Exemple 1 : clinopyroxènes

Les conséquences de l'application du modèle moléculaire ou ionique pour les activités de minéraux limites d’une solution solide sont illustrées par leur exploitation pour étudier les solutions solides des clinopyroxènes entre les pôles hédenbergite CaFe2+Si2O6 et acmite NaFe3+Si2O6.

Dans la structure des pyroxènes, Na+ et Ca2+ sont localisés sur les sites M2, Fe2+ et Fe3+ se substituant sur les sites M1 nettement plus petits que les sites M2. En appliquant le modèle moléculaire au clinopyroxène de composition (Ca0,4Na0,6)M2 (Fe2+0,4Fe3+0,6)M1 Si2O6, (ou pour simplifier 0,4 hédenbergite – 0,6 acmite) on obtient les activités de mélange idéal suivantes :

 

xhedMM = Xhed = 0,4

Et         xacmMM = Xacm = 0,6

 

Noter que la somme des activités de mélange idéales est égale à 1. Toutefois, ce n’est valable que dans le contexte du modèle de mélange moléculaire.

 

Si la solution solide de pyroxène est décrite avec le modèle de mélange aléatoire, les activités de mélange idéal deviennent :

xhed  = XCaM2 . XFe2+M1  = 0,4 . 0,4 = 0,16

Et         xacm  = XNaM2 . XFe3+M1  = 0,6 . 0,6 = 0,36

 

Dans ce cas-ci, la somme des activités n'est plus égale à 1. Il devrait être évident que les différentes activités des minéraux limites, étant obtenues par deux modèles de mélange idéal puissent causer d'énormes différences dans l’évaluation de conditions PT si l’un de ces minéraux limites est employé comme géothermobaromètre.

Ces modèles représentent deux cas de limitation pour la description des activités de mélange idéal. Dans la nature, la plupart des minéraux ont des états d’ordonnancement intermédiaires entre les situations de ces pôles. Ainsi, nous devons choisir lequel de ces modèles doit être employé pour décrire les activités de mélange idéal d’une manière la plus proche de la réalité.

Par suite des difficultés associées à la formulation des activités de mélange idéal en présence d’effets d’ordre à courte distance, les activités sont généralement décrites en termes de «mélange idéal sur sites» (ideal-mixing-on-sites (IMOS)), représentant une solution désordonnée, sauf si nous savons que le modèle moléculaire fournit une meilleure solution aux conditions PTX étudiées.

 

Pour formuler les activités de mélange idéal des minéraux limites, il faut également choisir, même dans le contexte du modèle IMOS, sur quel site du réseau cristallin les substitutions se produisent.

 

 

Exemple 2 : Comportement de mélange idéal du grenat dans le système Cao-FeO-MgO-Al2O3-Fe2O3- SiO2.

Considérons les substitutions Fe-Mg-Ca sur les seuls sites hexaédriques A. la formule structurelle du grenat peut s’écrire (Fe,Mg,Ca)3A Al 2 M  Si3O12. De ce fait, les activités de mélange idéal pour le grenat désordonné (G) pour les minéraux limites valent simplement :

 

xalmG  = (XFeA)3 ;   xpyG  = (XMgA);     xgrG  = (XCaA)3

 

En cas de substitutions multisites, ie avec substitutions sur les sites octaédriques comme par exemple Fe3+ et Al se substituant l’un à l’autre sur les sites M des grenats, la formule structurelle dans ce cas s’écrit (Fe,Mg,Ca)3A (Al Fe3+)2 M  Si3O12 et les activités de mélange idéal sont :

 

xalmG  = (XFeA)3 . (XAlM)2  ;    xpyG  = (XMgA). (XAlM)2 ;    xpyG  = (XMgA). (XAlM)2  

 

Les grenats sont un exemple de groupe minéral à multicomposants dans lesquels les sites des minéraux limites  ne sont occupés que par un seul type d’atomes. Si, cependant, il y avait plus d’un élément sur chaque site (cf amphiboles, pyroxènes, feldspaths, etc…), l’activité de mélange idéal xi, tendrait vers la valeur 1 lorsque la composition du minéral tendrait vers la composition de l’un des pôles du système, ie xi ->1 lorsque Xi ->1. Ceci requiert une procédure appelée normalisation.

 

3.8      Cas de solutions solides non idéales

Dans le cas de solutions solides non idéales, on parle de :

 

-          modèle de mélange régulier

-          modèle de mélange sous-régulier

-          modèle de mélange quasi chimique

-          modèle de solutions réciproque

-          de formalisme quadratique de Darken

 

qui ne seront que cités pour ne pas aborder des notions encore plus compliquées comme le montre la figure suivante.

 

 

Figure 12 : relations activité-composition (a-x) pour une solution binaire de pôles minéraux A et B

Le diagramme de gauche montre les relations pour le pôle A, celui de droite les relations du pôle B

Pour un mélange idéal, les relations a-x sont indépendantes de la température et sont représentées par deux droites.

Les autres courbes présentent le comportement des relations a-x pour des solutions régulières en fonction de la température, noter combien la différence entre le comportement du mélange réel diffère de celui du mélange idéal à mesure que la température augmente.

Les activités des corps purs ont été prises égales à 1 et le paramètre d’interaction à 15 kJ/mol

 

 

4.        GEOTHERMOMETRIE ET GEOBAROMETRIE

Les roches métamorphiques localisées dans la plupart des axes montagneux, présentent des valeurs de température et/ou de pression différentes des données géothermiques normales, rencontrées habituellement dans la croûte terrestre en l’absence de relief. Or, une observation directe des processus qui mènent à cette déviation des valeurs géothermiques normales est généralement impossible car ils se produisent à des profondeurs qui restent inaccessibles. Cependant, en considérant qu’au moins une partie des minéraux et des associations de minéraux demeurent préservés dans les roches et reflètent quasiment les conditions d’équilibre, il devient alors possible de déterminer les pression et/ou température sous lesquelles les roches se sont formées.

 

Cette déduction peut être réalisée soit en employant des géothermobaromètres, soit à partir des diagrammes de phase. Ces deux outils sont basés sur les principes d’équilibre thermodynamique.

 

Ces pressions et températures estimées peuvent être exploitées pour déterminer un chemin ou du moins un segment du chemin de l’évolution suivie par la roche dans le diagramme PT, pendant l'histoire de son métamorphisme, et peut fournir des informations précieuses sur les processus tectonothermaux et delà sur la possibilité d’existence de gisements.

 

L'idée d’appliquer des concepts et des méthodes thermodynamiques aux roches métamorphiques est loin d’être nouvelle. Elle est basée sur le travail avant-gardiste de J.W. Gibbs dès la fin du 19ème siècle.

Considérant que le cadre théorique est connu depuis plus d’une centaine d’années, l'application efficace des méthodes d'équilibre thermodynamique aux minéraux et aux roches, a toutefois été entravée par le manque de données thermodynamiques concernant les minéraux limites et par la méconnaissance des relations activité-composition (a-x) dans les minéraux.

Bien que les relations a-x soient encore mal connues aujourd’hui et sont sujetes d’intenses recherches et soumises à discussions, les données thermodynamiques quant à elles, sont désormais bien connues pour nombre de minéraux limites grâce à l'attention accrue des pétrologues au cours des dernières décennies (par exemple Robie et Waldbaum 1968 ; Robie et al 1978 ; Helgeson et al 1978). Les calibrages de nombreux géothermomètres et géobaromètres sont ainsi apparus (Essene 1982, 1989 ; Spear 1989,1993) à partir des données thermodynamiques déterminées à cette époque ( Berman et al 1985 ; Berman 1988 ; Holland et Powell 1985, 1990 ; Olbricht et al 1994 ; Gottschalk 1997).

 

Tous ont considérablement contribué à la préhension des roches métamorphiques, à leurs conditions de formation, et par conséquent à une meilleure compréhension des processus métamorphiques lors des processus tectoniques.

 

 

4.1       Principe de base de la Géothermométrie et de la Géobarométrie

Géothermomètres et géobaromètres sont des relations d’équilibres de réactions entre minéraux qui peuvent être utilisées pour déterminer respectivement, la température et la pression auxquelles une association (ou assemblage) de minéraux s’est formée.

 

Tous les calculs géothermobarométriques sont basés sur l'application de la condition d’équilibre   

 

                                                                0 = DGo + RT Ln  K                                                            rappel (Equation 8)

                       

L’enthalpie libre standard ou Energie de Gibbs pour les anglophones,  DGo dépend de la pression et de la température, et la constante d'équilibre K est fonction des compositions et des activités des minéraux.

 

 

4.2      Principaux critères

4.2.1. Approche PT

Les géothermomètres les plus appropriés sont ceux dont les équilibres sont indépendants ou quasi indépendants de la pression : l’évaluation de la température n’est alors que légèrement affectée par des données imprécises sur la pression. Ce qui se traduit physiquement par une pente raide dans le diagramme PT, et mathématiquement par une dérivée partielle ( P/ T)ln K élevée.

 

En revanche, une réaction, exploitée comme géobaromètre doit avoir une pente douce dans le diagramme PT car elle doit être quasi indépendante de la température, ce qui se traduit par une dérivée partielle  ( P/ T)ln K  faible.

 

Ces relations peuvent être démontrées en intégrant l'équation 11 exprimant les conditions d'équilibre pour une réaction, et en réarrangeant la relation :

 

                                                     P =    -DHPT + T DSPT  - RT Ln  K   +  1                  (Equation 11)

                                                                              DV

 

Dans cette formulation, l'approximation òPoP  DV dP = (P-1)  DV   est employée pour l’intégration du volume. Les termes pour les états de référence pour l'enthalpie D(Df HPo,To) et l'entropie TDSPo,To ainsi que leurs termes correctifs représentant l’influence de la température T, òToT  (DCP/T) dT sont combinés et écrits comme DHPT et T DSPT .

 

 

Figure 13 : Courbes schématiques des géothermomètres et des géobaromètres possibles dans le diagramme PT

 

 

En différenciant l'eq.12 par rapport à la température, et en laissant invariante la constante d'équilibre K, on obtient

                              æ P ö    =     DSPT  - R Ln K     =        DHPT  + (P-1) DV                                             (Equation 12  a))

                              è ¶ T øln K                 DV                         T DV

 

Pour les minéraux limites purs, la constante d'équilibre est égale à 1, soit ln K =0, et l'expression 12a s’écrit :

 

                              

                                 æ P ö           =       DS                                             Relation de Clapeyron        (cf 2.1.5)    (Equation 12 b)

                             è DT øln K             DV

 

Une expression similaire est obtenue pour des minéraux dont les compositions sont fixes.

 

L'équation 12b est connue sous le nom d’équation de Clausius-Clapeyron et peut être exploitée pour déterminer la pente d'une réaction sur un diagramme PT. Les pentes de réaction sont dessinées pour des minéraux dont les compositions sont fixes, ie pour une constante d'équilibre à valeurs fixées … -2, -1 0, 1, 2,… :  elles sont appelées lignes isoplèthes.

 

Une interprétation de l'eq. 14a montre que les géothermomètres doivent avoir des entropies et/ou enthalpies de  réaction élevées par rapport à la variation de volume de la réaction,

En revanche, les géobaromètres potentiels doivent avoir un grand volume de réaction, comparé à DS et DH.

 

 

4.2.2. Approche ln K

Les dépendances de ln K en fonction de la pression et de la température peuvent être montrée de façon analogue, en intégrant puis en différenciant ln K, respectivement par rapport à T à pression constante, et par rapport à P à température constante.

 

                                        æ ln K ö  =     DHPT  - (P-1) DV                                                  (Equation 13 a))

                                        è    T   øP                RT2

et

 

                                         æ ln K ö  =         DV                                                                   (Equation 13 b))

                                         è    P   øT          RT

 

 

 

 

 

 

 

 

 


ln K

 

(

ln K/

T )

P

ln K

 

(

ln K/

P )

T

T

P

 

Figure 14 : Les équilibres minéraux employés comme géothermomètre ou géobaromètre : Comportement en fonction de T ou P

Ceux qui sont employés comme géothermomètres doivent avoir des pentes raides dans le diagramme ln K= f(T) (à gauche) et les géobaromètres doivent avoir des pentes raides dans le giagramme ln K= f(P) (à droite).

Les erreurs sur ln K ne conduisent alors qu’à de faibles erreurs sur les estimations  des températures et des pressions, respectivement.

 

L’équation 14a montre que l’estimation de la température est considérablement facilitée lorsque l’enthalpie de réaction est élevée car dans ce cas,  ln K est très sensible à la température et les incertitudes sur la valeur de ln K  ne répercutent que de faibles erreurs sur les températures estimées.

De manière analogue, l’eq. 14b montre que ln K est très sensible à la pression si la variation de volume de la réaction est élevée, et les incertitudes sur la détermination de  ln K ne  produisent alors que de faibles erreurs sur l’estimation de la pression.

 

La figure ci-dessus illustre schématiquement la dépendance de la constante d'équilibre par rapport à la pression et la température.

 

 

4.2.3. Sélection des Géothermomètres et Géobaromètres

            Des réactions entre minéraux limites calibrées expérimentalement sont généralement les plus utilisées comme géothermomètres ou géobaromètres. Le tableau 1 en annexe reprend un certain nombre d’équilibres fréquemment appliqués. Pour une description et une discussion détaillées des géothermobaromètres, le lecteur intéressé pourra se diriger vers Essene (1982 ; 1989), Carswell et Harley (1990), et Spear (1993) qui n’a toujours pas répondu à mes mails.

Une autre possibilité pour calculer les conditions de la formation d'une association minérale est l'utilisation de données thermodynamiques « intrinsèquement compatibles ». Dans ce cas, des données calorimétriques fiables sont combinées avec des équilibres de phase déterminés expérimentalement pour définir des données thermodynamiques. Cette approche est basée sur les travaux de Helgeson et al (1978) et de Powell (1978) et a fourni des données fréquemment utilisées maintenant par Holland et Powell (1985, 1990) et  Berman (1988, 1991). La base de données de Berman inclut des données thermodynamiques pour environ 80 minéraux et celle de Holland et Powell contient approximativement 130 minéraux limites. Cette différence résulte des critères légèrement plus restrictifs de choix employés par Berman. Les données thermodynamiques des minéraux qui sont communs aux deux bases de données coïncident raisonnablement bien.

 

 

5.        GEOTHERMOMETRES

Les géothermomètres sont des réactions entre minéaux qui peuvent être utilisées pour obtenir par des calculs thermodynamiques une estimation de la température T de formation de la roche.

 

5.1      Conditions à remplir par un bon géothermomètre

1-        La variation d’entropie de la réaction Sr doit être élevée

 

2-        La variation de volume Vr doit être relativement faible

 

3-        La réaction doit avoir pu être étudiée expérimentalement dans des conditions PT comparables à celles de la roche étudiée

 

4-        La réaction doit ne pas être sensible aux éventuelles réactions chimiques qui interviennent dans la roche mère. Un bon géothermomètre est celui qui est applicable sur une large variété de roches avec différentes compositions

 

5-        Le couple de minéraux en équilibre à la température T ne doit pas subir d’évolution lors du métamorphisme rétrograde pour représenter fidèlement l’avancement maximal du processus de métamorphisme supporté.

 

 

5.2      Types et exemples  de géothermomètres

De nombreux équilibres réactionnels entre minéraux satisfont aux conditions énoncées ci-dessus. Néanmoins certains sont plus à même de fournir des réponses précises et justes sur leur température de formation. Ainsi, les réactions d’échange cationique sont particulièrement appréciées, telle la réaction d’échange Fe2+-Mg2, communément notée FeMg-1.

 

 

5.2.1. Réactions d’échange cationique

La plupart des géothermomètres sont des réactions d'échange cationique.  En général, celles-ci sont des réactions à faible variation de volume  DV mais à enthalpie DH et/ou entropie de réaction DS élevée.

 

Quelques géothermomètres sont basés sur l'échange entre le fer ferreux et le manganèse (Pownceby et al 1987) ou entre le nickel et le magnésium (Podvin 1988 ; Canil 1994), mais la majorité sont basés sur l'échange cationique FeMg-1, entre le fer ferreux et le magnésium dans les minéraux ferromagnésiens.

 

Un bon exemple est le géothermomètre grenat-clinopyroxène (cf Råheim et Green 1974 ; Ellis et Green 1979 ; Pattison et Newton 1989) qui est fréquemment employé pour estimer la température de la formation des associations minérales dans les faciès des granulites et des éclogites :

 

                                Fe3 Al2 Si3O12   +   3 CaMgSi2O6      =   Mg3Al2 Si3O12       +     3   CaFeSi2O6

                           almandin                diopside                     pyrope                     hédenbergite

 

Le caractère d'échange cationique Fe-Mg entre ces minéraux peut être mis en avant en ignorant tous les composants de système excepté le fer et le magnésium et en écrivant la réaction d'échange de la manière suivante :

                                     3 FeMg-1G    =   3 FeMg-1 Cpx

 

où les exposant indiquent les minéraux grenat et clinopyroxène,

 

 

La constante d'équilibre pour cette réaction d'échange peut alors être écrite sous la forme :

 

                                    ln K  = ln  æ apyG  . (ahedCpx)3ö                                       (Equation 14)

                                           è aalmG . (adiCpx)3   ø           

 

       apyG est l’activité du pyrope dans le grenat,

aalmG est l’activité de l’almandin dans le grenat,

le grenat étant composé d’un mélange de pyrope et d’almandin

de même pour les clinopyroxènes 

le coefficient stoechiométrique dans la réaction passe en exposant pour l’activité du minéral concerné.

 

 

Or, les activités des composants de phase dans les minéraux sont

 

apyG   = (xMgG . gpy)3,            aalmG   = (xFeG . galm)3,                                          (Equations 15)

adiPx   =  xMgPx . gdi    ,            ahedPx  =  xFePx. ghed  ,

où xi et gi  sont respectivement les activités de mélange idéal du minéral limite i et le coefficient d’activité de i,

la puissance représente le nombre d’atomes de l’élément en question dans la formule chimique du minéral (par exemple pour apyG, comme il y a 3 Mg2+dans Mg3Al2 Si3O12, la puissance est 3).

En remplaçant ces termes dans la relation de ln K, on obtient :

 

 

 

ln K  = 3  ln é æxMgG  ,  xFePx ö    .   ægpy , ghed ö  ù    =  3 (ln KD  +  ln Kg ) (Equation 16)

                                ë èxFeG  ,   xMgPxø        è galm , gdi ø  û

 

 

Le coefficient de distribution KD est formé par les activités des minéraux limites grenat et clinopyroxène dans un mélange idéal, et Kg est le coefficient correcteur entre le mélange réel et le mélange idéal.

 

La distribution d'éléments entre les minéraux coexistants peut être graphiquement illustrée en exploitant le coefficient de distribution KD. Quelques représentations les plus fréquemment rencontrées dans la littérature sont montrées en Figure. 4. Ces diagrammes peuvent être utilisés pour vérifier si les minéraux coexistants sont en déséquilibre ou pas. Ainsi, par exemple, si les compositions mesurées dans plusieurs couples grenat-clinopyroxène se trouvent toutes sur une ligne isoplèthe particulière, les minéraux ne sont probablement pas en déséquilibre. En revanche, des minéraux dont les compositions sont dispersées dans le diagramme KD sont très probablement en déséquilibre.

 

Il est également possible que le comportement de mélange non-idéal des minéraux puisse conduire à la déviation d'une ligne isoplèthe particulière. Si c'est le cas, il y a cependant, généralement, une corrélation perceptible entre les valeurs de KD et les compositions minérales.

 

 

Exemples

1-

Pôles olivine-orthopyroxène-spinelle-grenat 

La substitution FeMg-1 entre deux ferromagnésiens peut être exploitée comme géothermomètre. La plupart des couples de pôles de minéraux issus de ces groupes de minéraux sont aujourd’hui parfaitement calibrés expérimentalement et peuvent être appliqués aux roches du manteau (ie les xénolithes du manteau, péridotites ou péridotites à grenat), ainsi que pour les roches de faciès à granulites ou à éclogites.

 

2-

Clinopyroxène-grenat : almandin + 3 diopside = pyrope + 3 hedenbergite

Ce sont parmi les géothermomètres les mieux calibrés et les plus exploités. En particulier cette réaction (Ellis et Green (1979)) est très largement utilisée pour déterminer la température de formation des roches dans le domaine des éclogites, des péridotites à grenats et dans celui des granulites au-dessus des amphibolites d’origine métabasique.

 

3-

Grenat-biotite : almandin + phlogopite = pyrope + annite

Ce géothermomètre est quasiment à l’origine de la géothermométrie. Il a subi depuis pas moins de 22 calibrations différentes, dont la plus reconnue est celle définie par Ferry et Spear (1979). Ce géothermomètre est particulièrement adapté aux métapélites à faciès amphibolite.

 

 

5.2.2. Réactions faisant intervenir une phase liquide ou réaction de solutés

Les domaines de miscibilité ou de soluté entre  minéraux coexistants sont de temps en temps employés comme géothermomètres (par exemple clinopyroxène-orthopyroxène, feldspath plagioclase-alcalin, calcite-dolomite), lorsqu’une phase fluide intervient. Ils sont désignés sous le nom de thermomètre de solutés. Dans ce cas, on utilise les diagrammes de phase température-composition, et la température est simplement estimée en définissant la position de la température du soluté qui correspond à la composition minérale mesurée.

 

Ils sont principalement utilisés comme géothermomètre car ils ont une variation de volume Vr paticulièrement faible.

 

Thermodynamiquement, l’expression de  l’équilibre s’écrit simplement :

 

                        r = - RTln K + Vs(P-1)                                                  (Equation 17)

 

K peut alors être obtenu par le calcul des activités des pôles minéraux après analyse du composé et détermination des concentrations de ces pôles.

Vs peut être négligée car très faible.

La température T peut alors être déterminée.

 

Mais, attention l'erreur sur les températures estimées peut être grande car une faible incertitude sur la composition minérale mesurée peut mener à de grandes variations de température. Cela vaut particulièrement pour des solutés de pentes raides. De plus, la position d'un soluté ou d’un domaine de miscibilité peut changer avec la pression.

 

Les réactions ne sont généralement pas aussi exploitées en tant que géothermomètre que les réactions d’échange cationique, car la teneur en fluide des phases présentes ne sont généralement pas connues. En fait, c’est lorsque la température T de formation de la roche est connue par d’autres méthodes et qu’une réaction impliquant une phase fluide (par exemple déshydratation ou décarbonatation) est connue intervenir à la même température, que les coefficients d’activité des espèces fluides impliquées peuvent être déterminés.

 

D’un autre côté si la composition du fluide est connue (comme pour l’étude des inclusions fluides), alors la température T peut être déterminée. La relation utilisée dans les deux cas est :

 

                                    r = - RTln K

 

Nota

Pour les réactions de déshydratation et de décarbonatation, il est juste de poser Vs = 0.

 

 

Exemple : Thermomètre magnétite - ilménite 

Dans le système ternaire Fe-Ti-O, il y a deux réactions :

 

                                    Mgt + O2 = Hm                        sensible à la fugacité de l’oxygène fO2

 

Usp + Hem = Mgt + Ilm            sensible à la température

Il est ainsi possible de calculer ausp dans la solution solide de magnétite Mgt et aHm dans la solution solide d’ilménite à partir des analyses des deux phases et de déterminer T et fO2 graphiquement à partir des isoplètes.

 

 

5.3      Précautions

1-        Les géothermomètres ne doivent être utilisés que pour des roches formées sous des conditions PT comparables à celles pour lesquelles le géothermomète a été calibré expérimentalement.

 

2-        La plupart des calibrations expérimentales ont été définies pour des minéraux purs ( exemple : almandin, pyrope, diopside, hédenbergite, etc…). Cependant,  les minéraux naturels sont souvent des solutions solides complexes qui peuvent inclurent d’autres composants (par exemple, grossulaire et spessartine en substitution dans un grenat mélange de pyrope et almandin, Tschermakite dans les clinopyroxènes, etc…). Puisque comme l’indique la relation ai = xi.i , la connaissance de l’activité de mélange idéale "xi" du composant étudié almandin ou pyrope dans l’exemple des grenats ci-dessus) est insuffisante pour déterminer l'activité de ce composant, puisque le coefficient d’activité "i" reste indéterminé. Malheureusement, les valeurs de "i" ne sont jamais connues, ce qui conduit de nombreux chercheurs a simplifié le problème en considérant que le comportement de ces minéraux naturels répondent aux modèles du mélange idéal ou du mélange sur sites ( ce qui permet de poser i = 1). Cette approximation ou plus exactement cette modélisation peut être la source d’erreur très importante sur la détermination de la température de formation de la roche étudiée. Il est donc nécessaire d’appliquer un géothermomètre  à des minéraux dont les compositions sont aussi proches que possibles de celles des minéraux qui ont été utilisés dans la calibration. Par exemple, il n’est pas envisageable d’utilisé le géothermomètre d’échange Fe-Mg entre les grenats et les biotites si le grenat est trop riche en grossulaire.

 

3-        Equilibre rétrograde

       Il n’est pas rare que des minéraux voient leur composition évoluer après le pic de température du métamorphisme. Ces évolutions peuvent être dues soit à des réactions d’échange cationique comme cela intervient pour Fe et Mg dans les ferromagnésiens, soit à des réactions de transferts de masse. Dans le cas des grenats ce phénomène conduit à la zonation des grenats avec des zones plus riches en Fe et d’autres plus riches en Mg et à une zone superficielle dite rétrograde.

       La réaction

 

Fe3Al2Si3O12 + KAlSi3O8 + H2O = Al2SiO5 + KFe3AlSi3O10(OH)2 + 2 SiO2

 

       se produit lors de l’évolution rétrograde. Grenat et biotite développent tous deux de nouvelles compositions conduisant à la zonation des grenats.

 

       Pour minimiser les effets de ce rééquilibrage lors de l’évolution rétrograde et obtenir des valeurs de T aussi proches que possibles de la température du degré maximal de métamorphisme, il est préférable d’exploiter uniquement des échantillons riches en biotite et pauvres en grenat. La vitesse de diffusion de Fe2+ et de Mg2+ est nettement plus rapide dans la biotite que dans le grenat, rendant ainsi la biotite plus sensible aux variations de composition rétrogrades que les grenats. Mais si la roche est très riceh en biotite et pauvre en grenats, ces derniers ne pourront que faiblement venir « polluer » la matrice riche en biotite.

 

       Alors qu’une roche riche en grenat et pauvre en biotite va voir sa composition fortement modifiée et rendre la roche inexploitable.

 

 

Géothermomètre à échange cationique

 

Réaction

 

Faciès

Calibrages et commentaires

grenat-biotite

alm + phl = py + ann

amph, schistes verts

Ferry et Spear (1978), Hodges et Spear (1982), Perchuk et Lavrent'eva (1983),

Ganguly et Saxena (1984),

Indares et Martignole (1985),

Williams et Grambling (1990),

Dasgupta et autres (1991),

Bhattacharya et autres (1992),

Geesmann et al 1997

 

grenat-clinopyroxène

alm + 3 di = py + 3 hed

Granulites, éclogites

Ellis et Green (1979), Powell (1985),

Krogh (1988), Pattison et Newton (1989),

Perkins et Vielzeuf (1992)

 

grenat-orthopyroxene

py  + 3 forstérite = alm + 3 enstatite

Granulites, éclogites

Sen et Bhattacharya (1984),

Lee et Ganguly (1988),

Bhattacharya et al (1991)

 

grenat-cordiérite

2 alm  + 3 cd = 2 py + 3 fcd

granulites

Perchuk et Lavrent'eva (1983)

Bhattacharya et al (1988)

 

 

grenat-amphibole

4 alm  + 3 parg 3 = 4 py + 3 Fe-parg

 

Amph, éclogites

Graham et Powell (1984)

 

grenat-chlorite

5 alm 5 + 3 clin  = 5 py + 3 daph

 

schistes verts, schistes bleus

Ghent et al (1987), Grambling (1990)

 

grenat-phengite

alm + 3 cel = py + 3 Fe-cel

Amph, schistes bleus, éclogites

Krogh et Råheim  (1978),

 Green et Hellman (1982)

 

grenat-olivine

2 alm  + 3 fo  = 2 py  + 3 fay

                   (FeMg-1)

Mg3Al2Si3O12 + Ni2SiO4 = Ni3Al2Si3O12 + Mg2SiO4

                                    (NiMg-1)

 

 

 

Granulites, éclogites

éclogites

 

 

Kawasaki et Matsui (1977),

O’Neill et Wood (1979 ; 1980)

Canil (1994)

olivine-orthopyroxene

fo + fs = fay + en

      (FeMg-1)

Mg2SiO4 + 2 NiSiO3 = 2 Ni2SiO4 + MgSiO3

                               (NiMg-1)                                     

 

 

 

éclogites

 

 

 

Podvin (1988)

 

grenat-ilménite

alm + 3 py = spss de + 3 ilm

Amph, granulites

Pownceby et al (1987a, b)

 

 

biotite- mica blanc

phl + mu = cel + east

schistes verts, amph

Hoisch (1989)

 

 

amphibole-plagioclase-quartz

ed + 4 q = tr + ab

parg + 4 q = hb + ab

amph

Blandy et Holland (1990 , 1992a, b),

Hammarstrom et Zen (1992),

 

Rutherford et Johnson (1992),

Poli et Schmidt (1992), lHolland et Blandy (1994)

 

Oxydes Fe-Ti

Amph, granulites

Powell et Powell (1977a),

Andersen et Lindsley (1988),

Sack et Ghiorso (1991), Ghiorso et Sack (1991)

 

 

 

 

Géothermomètres à solutés

 

 

 

Réaction

 

Faciès

Calibrages et commentaires

Clinopyroxène-orthopyroxene

Granulites, éclogites

Saxena (1976), Davidson et Lindsley (1985), Bertrand et Mercier(1985), Brey et Köhler (1990)

 

plagioclase-feldspath alcalin

Amph, granulites

Powell et Powell (1977b),

Brown et Parsons (1981 ; 1985),

Fuhrman et Lindsley (1988),

Elkins et Grove (1990), Hovis et al(1991),

Kroll et al (1993)

 

calcite-dolomite

schistes verts

Powell et al (1984),

Anovitz et Essene (1987a)

 

muscovite-paragonite

schistes verts

Eugster et al (1972),

Chatterjee et Flux (1986),

Vance et  Holland (1993)

 

 

Table 1 : Principaux couples Géothermomètres

 

 

 

6.        GEOBAROMETRES

6.1      Généralités

Déterminer la pression est souvent plus difficile que le calcul de la température, ainsi les géobaromètres fiables sont sensiblement moins nombreux que les géothermomètres.

 

Un bon géobaromètre est celui qui est sensible aux variations de pression et relativement insensible aux variations de température.

En pratique, les réactions métamorphiques utilisées comme géobaromètres ont des variations de volume Vr importantes puisque ln K/P = -r/RT, et une faible variation d’entropie Sr puisque ln K/T = r/RT2.

Les meilleures réactions qui répondent à ces critères sont des réactions solide-solide, en paticulier les réactions de transition polymorphique.

 

Toutefois, l’utilisation de ces réactions de transition polymorphique ne peuvent être exploitées que pour des types de roches aux compositions très particulières.

 

 

6.2      Géobaromètres usuels

Les réactions de transfert de masse, dans lesquelles les cations voient leur degré de coordination évoluer au cours de la réaction sont fréquemment utilisés comme géobaromètres car le DV de réaction qui leur est associé est souvent élevé :

 

Voici un exemple de géobaromètre fréquemment utilisé:

 

2 Al[6] Al[6] SiO5   +    Ca Al[6] Al[6]  Si3O12     +      SiO2   =   3 Ca Al[4] Al[4]  Si2O8

                                      2  cyanite                            grenat                            quartz                 3   annite

 

où les indices supérieurs indiquent les degrés de coordination des cations dans les tétraèdres [4] et octaèdres [6], AlO4. Cette réaction est connue sous le nom de géobaromètre GASP (Grossulaire-Aluminosilicate-SiO2- Plagioclase) et a été calibrée par plusieurs scientifiques (Gand 1976 ; Newton et Haselton 1981 ; Ganguly et Saxena 1984 ; Koziol et Newton 1988).

 

 

Nota

Ces réactions sont traditionnellement écrites avec à droite les minéraux de haute pression.

 

 

Autres exemples

1-

Anorthite = grossulaire + aluminosilicate + quartz 

C’est le géobaromètre le plus utilisé pour le domaine des métapélites. Il est basé sur la calibration de Ghent (1976) et les calculs de Newtone et Haselton (1981) et Perkins et al (1982).

Son principal inconvénient réside dans la faible teneur moyenne en grossulaire des roches métapélitiques, et impose d’extrapoler la valeur de Xgrossulaire, alors beaucoup plus faible que les valeurs expérimentales

 

2-

Ilmenite + cyanite + Quartz = Almandin + Rutile (géobaromètre GRAIL)

C’est l’un des géobaromètres les plus utilisés dans le domaine des métapélites depuis que Bohlen et al (1982) ont montré que la réversibilité de la réaction était très faible. Son intérêt premier réside dans le fait que le grenat dans les métapélites est très riche en almandin, permettant de s’affranchir de toute extrapolation, source d’erreurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Géobaromètres à transfert de masse

 

 

 

Réaction

 

Faciès

Calibrages et commentaires

Grenat-Al2SiO5- plagioclase-quartz

2 Al2SiO5 + gr + q = 3 an

amph, granulites

"baromètre "

Ghent (1976), Newton et Haselton (1981),

Ganguly et Saxena (1984),

Hodges et Crowley (1985),

Koziol et Newton (1988),

McKenna et Hodges (1988)

 

grenat-plagioclase-biotite-mica blanc

alm + gr + mu = 3 an + ann

py + gr + mu = 3 an + phl

 

 

amph

« Baromètre Ghent et Stout »

 

Ghent et Stout (1981), Hoisch (1991)

 

grenat-plagioclase-pyroxène-quartz

2 py + gr + 3 q = 3 an +  3 en (opx)

py + 2 gr + 3 q = 3 an + 3 di (cpx)

granulites

 

 

Newton et Perkins (1982),

Perkins et Chipera (1985), Moecher et al (1988), Eckert et al (1991)

 

grenat-plagioclase-rutile-ilménite-quartz

gr + 2 alm 2 + 6 rt = 6 ilm + 3 an + 3 q

amph, granulites

« baromètre GRIPS"

Bohlen et Liotta (1986),

Anovitz et Essene (1987b)

 

Grenat-rutile-Al2SiO5- ilménite-quartz

alm + 3 rt = 3 ilm + Al2SiO5 + 2 q

Amph, granulites

"baromètre de GRAIL"

Bohlen et al (1983), Ghent et Stout (1984),

 Koziol et Bohlen (1992)

 

grenat-orthopyroxene-clinopyroxène-plagioclase-quartz

py + di + q = 2 en + an

alm + hed + q = 2 fs + an

 

granulites

Paria et al (1988)

Grenat–mica blanc-biotite-sillimanite-quartz

mu + alm = ann + 2 sill + q

Amph, granulites

Holdaway et al (1988), Hoisch (1990, 1991)

 

 

grenat-plagioclase-hornblende-quartz

3 ab + 6 an + 3 tr =  3 parg  + 2 gr  + py + 18 q

3 ab + 6 an + 3 ftr =  3 parg  + 2 gr  + alm + 18 q

 

3 tr + 6 an = 3 hb + 2 gr + py + 6 q

ftr 3 + 6 = un hb 3 + gr 2 + alm de + gra 6 q

 

 

 

Amph, schistes bleus, granulites

Kohn et Spear (1989)

 

 

 

Kohn et Spear (1990)

 

 

grenat-cordiérite-sillimanite-quartz

3 cd = 2 py + 4 sill + 5 q

3 fcd = 2 alm + 4 sill + 5 q

Amph, granulites

Newton et Wood (1979),

Harris et Holland (1984),

Aranovich et PodlesskIII (1983)

 

pyroxène-plagioclase-quartz

ab = jd + q

 

 

an = cats + q

 

Schistes bleus, éclogites

 

granulites

 

Holland (1980),

Hemmingway et al (1981),

 

Gasparik et Lindsley (1980)

Gasparik (1984)

 

pyroxène-olivine-quartz

2 fs = fay + q

 

granulites

Bohlen et aL (1980), Bohlen et Boettcher (1981)

Mica blanc-pyroxène-cyanite

Pa = jd+ ky + H2O

Schistes bleus, éclogites

Holland (1979)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Autres géobaromètres

 

 

 

Réaction

 

Faciès

Calibrages et commentaires

sphalérite-pyrrhotite-pyrite

Schistes verts

Fe-contenu dans la sphalérite  est en équilibre avec  la pyrite et la pyrrhotite hexagonale

Scott (1973 ; 1976), Hutcheon (1978),

Banno (1988), Bryndzia et al (1988 ;1990),

Toulmin et al (1991)

 

Baromètre à phengite

 

Teneur en Al de la phengite

 

 

 

Tenur en Si de la phengite

 

 

 

 

Amph, éclogites, schistes bleus, schistes verts

 

éclogites, schistes bleus,

 

 

 

Velde (1967), le Powell et l'Evans (1983),

Massone et Schreyer (1987)

 

 

Massone et Schreyer (1989)

Baromètre à hornblende

 

Teneur en Na de la hornblende en présence d'épidote, de plagioclase, de chlorite et d’oxyde de fer

 

Teneur en Al de la hornblende

 

 

 

schistes verts, schsistes bleus, éclogites

 

 

Roches granitiques

 

 

Brown (1977)

 

 

 

Hammerstrom et Zen (1986),

Hollister et al (1987), Johnson et Rutherford (1989)

 

Baromètre aux Al -orthopyroxènes

Teneur en Al dans l'orthopyroxene coexistant avec le grenat (dans le système CFMAS)

Granulites, éclogites

Harley (1984), Nickel et Green (1985),

Finnerty et Boyd (1987),

Brey et Köhler (1990)

 

Baromètre à la Ca-olivine

Teneur en Ca dans l'olivine coexistant avec le clinopyroxène

 

éclogites

Köhler et Brey (1990)

 

RAPPELS

q :            quartz                                      an :          annite                                       alm :        almandin                                 

py :          pyrope                                     sill :         sillimanite                                rt :            rutile

ilm :         ilmnéite                                    tr :            trémolite                                  cd :          cordiérite                                

fcd :         ferro cordiérite                         parg :       pargasite                                  hb :          hornblende

ab :           albite                                        jd :           jadéide                                     fs :           forstérite                                

fay :         fayalite                                     cast :        pyroxène Ca de  TSCHERMAK             CaAl[SiAl]O6                        

ky :         cyanite

 

Table 2: Principaux couples Géobaromètres

 

 

 

3-

Calcite = aragonite

Malgré les bonnes calibrations réalisées par Johannes et Puhan (1971) et Carlcon et Rosenfeld (1981), il n’est pas fréquemment utilisé pour les roches métamorphiques communes à cause de la facilité qu’a l’aragonite à se retransformer en calcite. Bref, même si pour des roches dont le métamorphisme est intervenu pour des pressions correspondantes au domaine d’existence de l’aragonite, celle-ci n’est que rarement préservée, remplacée par la calcite lors de son élévation vers la surface. On ne peut l’exploiter que lorsque la préservation de l’aragonite est plus favorisée comme dans les roches métamorphisées rapidement élevées sous de basses températures (au-dessous de 180°C d’après Carlson et Rosenfeld (1981)), c'est-à-dire dans le domaine basse température des schistes bleus.

 

4-

Albite = jadeite + quartz

C’est l’un des géobaromètres les plus utilisés dans les domaines des schistes bleus et des éclogites. Les solutions solides dans les clinopyroxènes et les feldspaths plagioclases rendent ce baromètre facilement exploitable aussi bien dans les roches métabasiques, métapélitiques que dans les roches granitiques ou arkosiques.

6.3      Utilisation des géobaromètres pour estimer des pressions maximales ou minimales

Il arrive parfois que les phases qui interviennent dans une réaction géobarométrique ne soient pas toutes présentes dans la roche étudiée. Dans ce cas, les géobaromètres peuvent encore être utilisés, mais seulement pour estimer soit une pression maximale, soit une pression minimale, à température T donnée.

Par exemple, si une roche contenant de la jadéite donne du clinopyroxène et du quartz, mais pas d’albite, alors la composition du clinopyroxène (ou le composé qui renferme la jadéite) peut être utilisé pour déterminer un minimum de pression en calculant l’isoplète approprié pour la réaction Jadéite + Quartz = Albite. D’une manière analogue, si la roche contient du clinopyroxène et du plagioclase, mais pas de quartz, alors la même réaction peut être utilisée pour donner cette fois, la pression maximale du métamorphisme.

 

 

7.        CALIBRAGE

7.1      Définition

Le calibrage est la détermination empirique d’une loi mathématique simple, qui relie la composition à la température dans le cas d’un géothermomètre, ou à la pression dans le cas d’un géobaromètre.

 

 

7.2      Différents types de géothermomètre-géobaromètre

Il existe deux types de calibrage basés sur la teneur en élément de référence. De même que l’on parle des colorations idiochromatiques lorsque l’élément colorant est l’un des composants de base du minéral, ou allochromatiques lorsque l’élément colorant n’est présent que sous la forme d’impuretés ou de traces dans le minéral hôte, on distingue les géothermomètres (ou géobaromètres) dont les éléments sont soit des éléments constitutifs du minéral étudié, soit des traces ou inclusions.

Dans le cas d’un géothermomètre ou géobaromètre constitutif du minéral, l’expression du calibrage fait traditionnellement intervenir la constante de distribution KD. Par exemple dans le cas de la transition « FeMg-1 »,  KD s’exprime sous la forme KD = (Fe/Mg)produit/(Fe/Mg)réactif.

 

Dans le cas d’un géothermomètre ou géobaromètre présent sous forme d’exclusions ou de traces, l’expression du calibrage fait intervenir directement la concentration en cet élément, le plus souvent exprimée en ppm (partie par million ou gramme par tonne). Par exemple dans ce type de géothermomètre, nous pouvons rencontrer :

 

-            La pénétration de l’yttrium Y dans les grenats en présence de monazite qui est très sensible à la température (Pyle et al 2001)

 

-            La teneur en zirconium Zr du rutile en inclusion dans les grenats et pyroxènes (Zack, Moraes et Kronz 2004)

 

Pour de telles inclusions, il est souvent préférable d’utiliser des grenats à croissance porphyroblastique, c’est à dire que le grenat a piéger au cours de sa formation des microminéraux présents antérieurement, car les coefficients de diffusion des éléments dans les grenats sont particulièrement faibles, même au-delà de 1150°C (Moraes et al). Les grenats sont donc des minéraux qui ont la faculté de figer les caractéristiques des minéraux qu'ils ont piégés lors de leur croissance.

 

 

7.3      Détermination du calibrage

7.3.1. Etape 1 Echantillonnage

Le calibrage d’un géothermomètre (ou géobaromètre) est basé sur l’exploitation d’un grand nombre d’échantillons prélevés sur des terrains distincts etqui ont été particulièrement étudiés, ie dont les détails pétrographiques et thermobarométriques ont été publiés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Figure 15 : Détermination de la composition d’un grand nombre d’échantillons issus de 6 localités différentes.

 

 

7.3.2. Etape 3 Exploitation des analyses

Exploitation de la zonation

L’exploitation de la zonation dans un minéral est particulièrement intéressante car nous pouvons considérer la température identique dans tout le minéral. Ainsi la zonation fournit à température donnée, une corrélation entre la composition (teneur en élément de trace, ou KD) et la pression.

 

 

7.4      Exemples de calibrages

Comme nous pouvons le voir sur la Figure 7, un même géothermomètre ou géobaromètre (géothermomètre d’échange d’ions FeMg-1 entre grenat et biotite et géobaromètre GASP dan s cet exemple), fournissent autant de droites qu’il y a d’auteurs. Or ces droites sont les expressions géométriques des calibrages mathématiques de ces réactions géothermobarométriques.

 

1-

Géothermomètre grenat-biotite

 

a) T°C = (2740 + 23,4P)/(ln KD + 1,56) – 273

 

b) Ln KD = - 2109/T(K) + 0,782                                            (Spear) Figure 6

 

avec KD = (Fe/Mg)Grt/(Fe/Mg)Bt

       et P en kbar

 

    

2-

Géothermomètre grenat-cordiérite

 

T°C = (2725 + 15.5P)/(ln KD + 0.896) – 273

 

 

avec KD = (Fe/Mg)Grt/(Fe/Mg)cd

       et P en kbar

3-

Géothermomètre grenat-orthopyroxène

 

T°C = (1882 + 705XCa + 11.50P)/(ln KD + 0.986) – 273

 

 

avec KD = (Fe/Mg)Grt/(Fe/Mg)Opx et XCa = Ca/(Fe+Mn+Mg+Ca) dans le grenat

       et P en kbar

 

 

4-

Géothermomètre aux deux pyroxènes

Basé sur la distribution de Mg2Si2O6 entre les ortho et les clinopyroxènes

 

T°C = 7341/(ln K + 3.355 + 2.44XFe) - 273          (Wells 1977)

 

 

avec XFe = Fe/(Fe+Mg) dans les orthopyroxènes

      K = a(en,Opx)/a(en,Cpx) = (X(Mg,M2).X(Mg,M1))Opx/(X(Mg,M2).X(Mg,M1))Cpx

 

 

 

Figure16: Exemple de calibration du géothermomètre grenats-biotites (Ferry et Spear 1978)

 

 

8.        SOURCES D’ERREURS

8.1      Précision et exactitude des géobaromètres

8.1.1. Exactitude

L’exactitude est la caractéristique qui indique si les résultats sont proches de la températur ou de la pression réelle du métamorphisme. Elle est généralement assez difficile à déterminer sans les expériences dont les géothermobaromètres sont parfaitement décrits, et les données thermodynamiques des phases présentes (ie activités, coefficients d’activité, entropie, enthalpie, DV… etc) parfaitement déterminées.

 

 

8.1.2. Précision

La précision est simplement la qualité de reproductibilité des résultats.

 

Par exemple, si vous appliquez un thermobaromètre à une roche en utilisant les compositions chimiques de deux minéraux adjacents dans l’équilibre texturant, vos résultats seront très précis dès que vous obtiendrez les mêmes valeurs en appliquant le même thermogéomètre à deux autres grains voisins dans la même roche. En général, la plupart des géothermomètres sont une précision de +- 50°C (voire +- 25°C pour le géothermomètre Grenat-Biotite appliqué dans les roches du faciès amphibolite). La plupart des géobaromètres ont une précision de +- 1 kbar.

 

Précis

mais inexact

Exact

mais imprécis

Précis

et exact

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Figure 17: Précision et exactitude

 

 

9.          ERREURS ADDITIVES

En principe, l'application des géothermomètres et des géobaromètres est simple.

 

Les variables d’état thermodynamiques exigées telles que l'enthalpie, l'entropie, etc, sont raisonnablement bien connues pour la plupart des minéraux, et les compositions minérales peuvent être obtenues par analyse à la microsonde électronique, Néanmoins, il y a divers pièges qui peuvent considérablement affecter l'applicabilité des résultats géothermobaromètriques :

 

Les techniques géothermomètriques et géobaromètriques ne peuvent être appliquées aux roches que si les textures du minéral et les relations paragénétiques dans les roches sont bien comprises, et, de plus, s'il peut être démontrer que les associations de minéraux concernées ne sont pas en déséquilibre ;

 

l'application des méthodes géothermobaromètriques à des associations en déséquilibre non identifié est probablement la plus grande source d'erreur de toute évaluation du couple de conditions de formation PT.

 

Malheureusement, il n'est pas possible de prouver l'équilibre de manière incontestable, mais il existe toutefois quelques critères susceptibles de nous renseigner sur une éventuelle situation de déséquilibre (Seifert 1978 ; Lance et Paon 1989). Cette analyse doit toujours être faite avant toute étude géothermobaromètrique.

 

 Dans le reste de ce chapitre nous considèrerons toujours que les associations de minéraux étudiées sont en équilibre.

 

En dépit du caractère quantitatif apparent de toutes les méthodes géothermobaromètriques, les résultats obtenus par ces études peuvent être tout à fait incertains, Et ce, pour diverses raisons :

 

-          La première est liée au calibrage du géothermomètre ou du géobaromètre. Pour des raisons de temps, les recherches expérimentales sont fréquemment réalisées pour des conditions PT données, très différentes de celles pour lesquelles le thermomètre ou le baromètre ont été définis. Par exemple, le thermomètre grenat-biotite a été essentiellement calibré aux températures excédant 600°C (Ferry et Spear 1978). Mais il est souvent appliqué aux associations qui se sont formés à des températures beaucoup plus basses, par extrapolation sur un grand domaine de conditions PT, conduisant ainsi à de grandes incertitudes sur les résultats obtenus

-          Les paramètres chimiques ou physiques du cristal peuvent avoir une grande influence sur les évaluations de la température et/ou de pression. Par exemple, Putnis et Holland (1986) ont démontré que la position PT  de la réaction

 

                                      Mg2Si2O6    +  2  Al2SiO5   +   SiO2    =   Mg2Al4Si5O18

                                        enstatite           sillimanite       quartz            cordiérite

 

dépend fortement du degré d'ordre/désordre (Al, Si) sur les sites tétraédriques dans la cordiérite. Dans les conditions des facies des granulites aux alentours de 950°C, il peut y avoir une différence atteignant 3 kbar sur le positionnement de la réaction dans l'espace PT (flèche sur figure ci-après), ce qui correspond à une différence d'environ 10 kilomètres sur l’évaluation de la profondeur de formation de la cordiérite. Les degrés d'ordre, dans le feldspath, le pyroxène, la cordiérite, etc. , peuvent donc considérablement affecer les déterminations du couple PT. Avant toute application d’un thermomètre ou baromètre particulier, l'utilisateur doit tout d’abord estimer le degré d'ordre dans les minéraux.

 

 

 

Figure 18: Influence du degré d’ordre dans la cordiérite sur la position PT  de la réaction

enstatite +2 sillimanite +  quartz   =  cordiérite dans le système  MgO-Al 2O3 - SiO2 (d’après Putnis et Holland 1986)

 

 

Figure 19: Différents faciès métamorphiques en fonction de la pression et de la température

Les couples géothermobarométriques et leurs calibrations doivent être choisis en fonction du domaine de formation de la roche étudiée.

 

-          Beaucoup de minéraux contiennent simultanément du fer ferrique Fe3+ et du fer ferreux Fe2+. La manière dont le rapport Fe2+/Fe3+ est déterminé peut avoir une influence certaine sur les résultats de l’évaluation des conditions PT. Il est recommandé que le rapport Fe2+/Fe3+ d'un minéral particulier soit toujours estimé en employant la même méthode afin de permettre au moins, la comparaison des évaluations des conditions PT d’une étude à l’autre.

 

-           La forme des relations a-x dans les minéraux peut également avoir une forte influence sur le résultat d’une évaluation de conditions PT (Figure 8). Pour la plupart des minéraux, il  n’y a généralement pas d’accord sur les modèles a-x. Parfois, plusieurs interprétations différentes peuvent conduire à des estimations de pression et de température très éloignées. Ceci résulte du fait que la plupart des déterminations des paramètres d’interaction sont empiriques et proviennent de l’expérience. Il est souvent possible d'adapter des données expérimentales à différentes équations de modèles, comme les modèles de mélanges. Ainsi, les enthalpies excessives dans le système binaire grossulaire-almandin déterminées par Geiger et al (1987) et utilisées par Berman (1990) pour un mélange  quaternaire  de grenat peut,  en termes  d'incertitudes  expérimentales, être décrit

 

Figure 20 : Influence du modèle sur la détermination des données thermodynamiques en fonction de la composition 

Le modèle et la calibration doivent être choisis de manière judicieuses pour bien respecter le cas réel et fournir des valeurs de PT les moins erronées possibles

 

Figure 21 : Influence des erreurs dues aux calibrations sur la détermination des conditions PT

avec comme type de modèles, le modèle de mélange sous régulier, le modèle de mélange régulier voire le modèle de mélange idéal (cf fig, 3a dans Berman 1990),

 

       En l'absence des critères absolus pour le choix d'un modèle particulier a-x,  il est suffisant de choisir le modèle du mélange le plus simple qui décrit les données expérimentales d'une manière satisfaisante. Pour des calculs thermodynamiques, il est recommandé d'employer toujours la même relation a-x pour un minéral donné, à moins que des études plus récentes ne prouvent qu’un modèle ancien devienne critiquable. Ceci, au moins, a l’extrême avantage de permettre une comparaison directe des résultats obtenus. La forte dépendance des résultats de la plupart des méthodes géothermobaromètrique à l’égard des relations a-x choisies dans les minéraux est illustrée en paragaphe 3.

 

En raison de ces derniers points et de quelques autres aussi, il est évident que les évaluations PT puissent être très dépendantes des modèles. Par conséquent, il est certainement  trop optimiste de compter qu'une évaluation des conditions PT pour une association minérale donne la pression et la température exactes auxquelles l'association s’est formée. Au mieux, les méthodes géothermobaromètrique sont capables de délimiter un certain domaine PT dans lequel une association minérale s’est probablement formée.

S’il s'avère qu'un tel domaine est très étroit, il est clair que peu de problèmes ne viendront ternir l’interprétation des résultats.

 

Néanmoins, il est possible que des incertitudes sur une évaluation des conditions PT puisse être de l'ordre de 100°C et/ou de quelques kilobars, et rendent l'histoire tectonique ou métamorphique d'une roche ou d'une région donnée plutôt ambiguë. Il est donc souhaitable d'estimer la probabilité des conditions calculées de formation d'une association minérale. C'est un problème de cumul d'erreurs.

 

En dépit des pièges potentiels des investigations géothermobaromètriques, une étude soigneuse comme, par exemple celle effectuée par St-Onge (1987), peut, avec une recherche structurale détaillée, fournir une quantité substantielle d'informations sur l’histoire tectonométamorphique d’une région.

Incertitude globale

Valeurs PT analytiques

Incertitude due

au modèle d’activités

Incertitude due

à la composition réelle

Incertitude due à la calibration

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Figure 22 : Récapitulatif des sources d’erreurs sur la détermination des conditions PT

Courbe d’exactitude à un écart type 1 s.

En résumé et par ordre croissance d’importance sur leurs effets, les différentes sources d’erreurs sont :

          1- Imprécision sur les analyses à la microsonde

          2- ERREUR sur les déterminations des variations de volume DrV

          3- Incertitude sur les compositions étalons de la microsonde et sur les facteurs de correction

          4- INEXACTITUDE SUR LES CALIBRATIONS EXPERIMENTALES (Figure 9)

          5- INCERTITUDES SUR LES MODELES D’ACTIVITE DES MINERAUX

          6- “INCERTITUDE GEOLOGIQUE” à partir d’hétérogénéité des compositions

 

10.    DETERMINATION DES PARAMETRES PT

En reprenant tout ce qui a été précédemment énoncé, voici comment un géologue peut déterminer les conditions de formation d’une roche. Vous remarquerez que cette démarche est à quelque détails près la même que pour la détermination d’un calibrage.

           

1-        Tout d’abord il effectue un prélèvement sur le terrain et pratique à un échantillonage. Au sens scientifique, un échantillonnage est le choix d’un élément (association minérale dans notre cas) représentatif de l’ensemble. Pour remédier à l’inexactitude d’un échantillonnage, on peut prélever un grand nombre d’échantillons et, soit moyenner sur l’ensemble, soit éliminer les échantillons qui s’avèrent erronés.

 

 

Figure 23 : Dans cet exemple, le but est de déterminer les différentes conditions P-T de formation d’un grenat

porphyroblastique contenant des cristaux de plagioclases. Les plagicolases sont suffisamment petits pour être considérés comme homogènes. En revanche, le grenat présente une zonation que l’on souhaite étudiée.

 

 

 

 

 

 

 

On mesure donc les concentrations du coeur vers la surface du grenat

 


 

 

Figure 24: l’utilisation du géothermomètre grenat/biotite et du géobaromètre GASP permet de définir les conditions PT pour chacune des zônes du grenat et ainsi définir l’évolution du couple PT au cours de la cristallisation du grenat.

 

 

On constate dans le cas de cet exemple, une forte augmentation de la pression pour un faible échauffement (qui peut être dû à la simple présence de l’augmentation de pression). Il s’agit donc vraisemblablement d’une collision de plaque sans enfouissement.

 

2-      Le géologue, à partir du domaine de faciès dans lequel il a fait ses prélèvements et à partir des minéraux qu’il a indentifiés, choisira un couple géothermomètre/géobaromètre approprié. Dans notre exemple ont été retenus le géothermomètre grenat/biotite et le géobaromètre GASP.

 

3-      Le géologue mesure ensuite à la sonde électronique les différentes concentrations relatives en éléments correspondants aux géothermomètre et géobaromètre sélectionnés. Il a ainsi les relations de compositions en Xi.

 

4-      A partir de ces mesures et du choix de type de mélange qu’il aura également choisi, il passera des relations en Xi à celles en xi et ai, fonction des activités des différents minéraux. Il peut alors déterminer la valeur de la constante d’équilibre KD.

 

5-      Il ne lui reste plus qu’à introduire les relations qu’il a ainsi obtenues dans le calibrage de ses géothermomètre et géobaromètre pour obtenir P et T de formation de la roche.

 

11.    QUELQUES EXEMPLES

11.1   Grenats : indicateurs de pression et température

Nous avons pu constater au cours de l’étude de différents sites métamorphiques qu’en fonction des paramètres P-T- composition, les minéraux rencontrés étaient différents. Or la pression et la température sont directement corrélés aux événements subis par la roche mère et à la métasomatose, où l’intrusion d’éléments métallifères est responsable de la modification des constituants élémentaires de la roche.

 

Figure 25: exemple de métasomatose

a)    pistacite (épidote) à droite et grenats grossulaire à gauche : falaises au droit de Guernehué (56)

b)    almandin dans une intrusion de goethite - La Guichardais (56)

 

Ainsi, en faisant une réflexion rétrograde, à partir de l’étude des minéraux présents dans une roche, on peut connaître les conditions physico-chimiques qui ont régnées lors de la formation de ces minéraux, et de proche en proche, déterminer le faciès de toute une zone géographique pour définir précisément l’histoire géologique de cette région.

Les grenats qui sont très fréquents, dans de nombreux faciès métamorphiques, et dont le domaine d’existence dans les diagrammes P-T sont relativement restreints, sont de bons indicateurs de conditions physiques de formation, pour des roches qui ont subi des températures moyennes à élevées et des pressions élevées.

 

 

11.2   Evolution métamorphique

Au cours du métamorphisme, les roches subissent en fonction de la température et de la pression, ce que l’on nomme des degrés de métamorphisme : de la simple compression ou diagénèse au premier degré, jusqu’à des conditions bien supérieures. Pour des pressions et températures plus élevées, apparaissent des déformations dues au métamorphisme et voir le cas échéant, si la température augmente encore, fusion et recristallisation. On parle de métamorphisme prograde lors de l’enfouissement et de métamorphisme rétrograde lorsque la roche voit ses contraintes relaxées lors de l’érosion de la roche environnante..

 

Au cours de son évolution, une roche traverse différents domaines d’existence de minéraux. On parle disogrades. Les isogrades sont des lignes limites de présence d’un minéral donné, observées sur le terrain. Lorsque l’on se déplace de la roche mère non métamorphisée vers le bloc intrusif dans le cas d’un métamorphisme de contact, on parle d’isograde positif lorsqu’il s’agit de la limite à partir de laquelle on trouve le minéral en question, et d’isograde négatif lorsque ce minéral disparaît au profit de d’autres minéraux.

Il en est de même en ce qui concerne les domaines thermodynamiques P-T d’existence d’un minéral. La roche mère, lors de ses déformations traverse les domaines d’existence de minéraux.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Figure 26 : Evolution des déformations possibles dans une roche lors de la montée en température et en pression lors du métamorphisme.

A partir du point A, la roche pénètre dans le domaine magmatique, il y a alors fusion partielle et recristallisation de minéraux.

Lors de la relaxation des contraintes (abaissement de la pression, il peut y avoir également réhydratation (et donc disparition des grenats éventuellement présents).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Figure 27 :  Evolution d’une roche schisteuse qui traverse le domaine HT-MP (faciès amphibolites)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Figure 28 : Evolution d’une roche schisteuse et micaschisteuse (roche pélitique )qui traverse le domaine HT-MP

(faciès amphibolites)

Indication des domaines d’existence des minéraux et des réactions présentes  dans la roche au cours de son évolution.

Indication des domaines isogrades des grenats

 

Sur le terrain, il convient de recueillir différents échantillons représentatifs. En fonction des minéraux présents, ces échantillons indiquent les conditions maximales de pression et de température subies par la roche, c’est à dire le degré de métamorphisme. Ces informations complétées par la localisation précise du lieu de récolte permettent de définir l’histoire du métamorphisme local.

 

En particulier, les grenats sont des indicateurs très intéressants pour les roches qui ont subies des conditions HP-MT et HP-HT (faciès des éclogites) et MT-BP (cornéennes).

 

 

11.3   Exemple : thermobarométrie des gneiss migmatiques de l’unité de Filali  (massif de Beni Boussera : rif interne).

Ces gneiss migmatiques comportent un assemblage complexe de minéraux. L’étude du milieu a permis de définir que la roche a été affectée par une première phase de migmatisation syn-pic thermique dans domaine de stabilité de la sillimanite par la réaction :

 

          biotite              +     sillimanite + quartz     ->     grenat       +   feldspath potassique   + liquide.

K(Mg,Fe)3 (OH,F)2(Si3AlO10)         Al2SiO5         SiO2             Mg3Al2(SiO4)3             KAlSi3O8

 

Les conditions P-T du paroxysme thermique estimées par usage de plusieurs calibrages du thermomètre GARB et du baromètre GASPQ sont de 710-810°c et 6,6-9 kbars.

 

Une évolution métamorphique décompressive presque isotherme aboutit ensuite au développement de la cordiérite par le biais des réactions:

 

grenat + sillimanite + quartz + H2O -> cordiérite

et        biotite + sillimanite + quartz (+- plagioclase) -> cordiérite + feldspath potassique + liquide

Cette dernière réaction amène les gneiss à subir une deuxième phase de migmatisation à basse pression qui s'est toujours manifestée dans le domaine de stabilité de la sillimanite sous des conditions P-T de 640-­740°C et 4,5-5 kbar. La décompression isotherme précitée et la nature soustractive du contact tectonique séparant l'unité de Filali de l'unité granulitique sous jacente attribuent l'exhumation des gneiss à la tectonique extensive d'âge Miocene manifestée dans le domaine d'Alboran suite à la collision Afrique-Ibérie.

 

Les gneiss subissent finalement un refroidissement à pression constante ayant donné lieu aux développements de la biotite et la sillimanite et/ou micas blancs au détriment de la cordiérite par la mise en jeu des réactions:

 

cordierite + feldspath potassique + H20 -> biotite + sillimanite + quartz

et                     cordierite + sillimanite + feldspath potassique + H20 -> phengite + quartz

 

et ce en cours de l'évolution thermique rétrograde qui s'achève dans le faciès schistes verts.

 

 

11.4    Exemple : granulites de  TIDJENOUINE (HOGGAR, ALGERIE)

Les granulites à pyroxène-fayalite-quartz de la région de Tidjenouine (Hoggar, Algérie) présentent des compositions très particulières. Elles sont très riches en fer (Fe203 = 25 wt%, XFe = 0.75­-0.80), en titane (1.6 à 2.5 wt%) et en P205 (0.70 à 1.70 wt%). L'allure relativement plate des terres rares normaliséés aux chondrites ((La/Yb)N = 1,2 à 4) et les teneurs en éléments en traces qui sont en général de 10 à 30 fois celles du manteau primitif les rattachent à une lignée magmatique tholéitique intra-continentale dont les autres composants sont également présents dans la région.

 

Leur minéralogie, qui est très rare au Hoggar est remarquable par l'association primaire à grenat (XFe = 0,82, XGrs = 0,25) - clinopyroxène (XFe = 0,45) - hornblende (XFe = 0.65) - Qtz qui se déstabilise au profit de symplectites à orthopyroxène (XFe = 0,70 à 0,77) -plagioclase (XAn = 0,95) -fayalite (XFe = 0,86 à 0,92). La fayalite et l'orthopyroxène, peuvent également être en couronne autour du quartz ou en symplectites avec des opaques.

 

Ces roches présentent ainsi une minéralogie idéale pour la détermination des conditions P-T-fO2 traversées par ces granulites. En effet, la présence de la fayalite autour du quartz peut s'expliquer par une réaction de type :

 

3 quartz + 2 magnétite = 3 fayalite + 02 (tampon QFM)

 

alors que le déclenchement des réactions qui permettent de passer de la paragenèse primaire à la paragenèse secondaire et qui sont, entre autres, les suivantes :

 

Grt + Cpx = Opx + Fay + PI

Grt + Cpx + Qtz = Opx + Pl

Quartz + 2 Ulvspl = 2 Ilm + Fay

2 Quartz + Ulvspl = Ilm + Opx

 

permettent d'estimer les conditions rétrogrades qui sont de 800 - 700°C et 4 - 3 kbar. Les conditions du pic du métamorphisme sont quant à elles de 875 + 50°C et 7,5 kbar. Ces résultats sont en conformité avec ceux obtenus sur l'encaissant métapélitique migmatisé de ces granulites.

 

 


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variable Al2O3 and MgO/(MgO+FeO) on mineral stability

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Sommaire

1.      LES GRILLES PETROGENETIQUES. 221

1.1       Définitions. 221

1.2       Exemple (Fig. 1) 222

1.3       Paragenèse. 222

1.4       De l'observation de terrain au diagramme PT.. 222

1.5       Isogrades. 223

2.      THERMODYNAMIQUE DE REACTION.. 225

2.1       Généralités. 225

2.2       Relations entre G, S et V.. 225

2.3       Enthalpie libre de formation. 226

2.4       Enthalpie libre de réaction. 226

2.5       Relation de Clapeyron – Diagramme de phase. 227

2.6       Constante d’équilibre. 228

2.7       Activité. 229

3.      ENTROPIE DE MELANGE – RELATION ACTIVITE-COMPOSITION a-x. 229

3.1       Solutions solides minérales. 229

3.2       Substitutions : Quelques Remarques Générales (cf § 4.2.2) 232

3.3       Thermodynamique  des solutions solides. 232

3.4       Concept de solution solide idéale – non idéale. 234

3.5       Activités de Mélange Idéal 234

3.6       Concepts Généraux. 234

3.7       Modèles thermodynamiques pour les activités de mélange idéal 235

3.8       Cas de solutions solides non idéales. 237

4.      GEOTHERMOMETRIE ET GEOBAROMETRIE.. 237

4.1       Principe de base de la Géothermométrie et de la Géobarométrie. 238

4.2       Principaux critères. 238

5.      GEOTHERMOMETRES. 240

5.1       Conditions à remplir par un bon géothermomètre. 241

5.2       Types et exemples  de géothermomètres. 241

5.3       Précautions. 243

6.      GEOBAROMETRES. 246

6.1       Généralités. 246

6.2       Géobaromètres usuels. 246

6.3       Utilisation des géobaromètres pour estimer des pressions maximales ou minimales. 249

7.      CALIBRAGE.. 249

7.1       Définition. 249

7.2       Différents types de géothermomètre-géobaromètre. 249

7.3       Détermination du calibrage. 249

7.4       Exemples de calibrages. 250

8.      SOURCES D’ERREURS. 251

8.1       Précision et exactitude des géobaromètres. 251

9.      ERREURS ADDITIVES. 252

10.        DETERMINATION DES PARAMETRES PT.. 256

11.        QUELQUES EXEMPLES. 257

11.1         Grenats : indicateurs de pression et température. 257

11.2         Evolution métamorphique. 258

11.3         Exemple : thermobarométrie des gneiss migmatiques de l’unité de Filali  (massif de Beni Boussera : rif interne). 260

11.4         Exemple : granulites de  TIDJENOUINE (HOGGAR, ALGERIE) 261